Les siècles passent, mais quelque chose d’inquiétant survit dans le cœur humain.
« Tenaces racines du racisme », p. 53.
Il y a dans Antiterre, le « remarquable » dernier-né de Victor-Lévy Beaulieu, « une charge contre le capitalisme et le ‘Dieu-Économie’ qui n’est pas nouvelle […], mais avec une conscience écologique et planétaire en plus ». Un ouvrage curieux, inattendu, dans lequel François Ouellet observe « le repositionnement du romancier par rapport au nationalisme québécois ».
En 1939, le monde de Stefan Zweig s’écroule ; la « foi humaniste » de l’écrivain a été vaine. Il se donne la mort en 1942, en plein désespoir, n’ayant pas la patience d’attendre le terme de la « longue nuit » qui voit l’Europe s’autodétruire. Roland Bourneuf, dans « La montée de l’ombre », revisite la vie et l’œuvre de l’auteur du Joueur d’échecs et du Monde d’hier alors que Patrick Bergeron se penche sur sa Correspondance 1932-1942, document grave et précieux.
« C’est un peu comme si un théologien de la chrétienté avouait n’avoir jamais lu la Bible »… À l’instar de plusieurs des écrivains qui ont à ce jour signé la rubrique « Le livre jamais lu » de Nuit blanche, le scientifique Alain Olivier, également auteur de deux romans et de deux récits dont Voyage au Mali sans chameau, a été profondément nourri d’une œuvre capitale, par écrits interposés. La non-lecture de L’origine des espèces de Charles Darwin préside ici à une passionnante réflexion. « Faudrait-il porter un peu plus d’attention à nos cousins animaux pour mieux saisir ce que signifie qu’être libre ? »
Le grand Darwin – même lui ! – n’a pas su échapper, du moins dans son jeune âge, à l’époque pétrie de racisme qui fut la sienne et qui lui fit notamment décrire ses contemporains de la Terre de Feu comme des « sauvages ignobles, infects1 », et pire encore. Colonialisme, domination, esclavage… Aujourd’hui, « le fouet claque plus rarement, mais la propension demeure de considérer comme inférieur tel ou tel groupe humain ». Ce sont de « Tenaces racines du racisme » qu’examine Laurent Laplante à travers quatre récentes publications; trois romans et un essai.
L’histoire nous dira peut-être un jour combien de femmes se sont jusqu’à hier encore pseudonymisées afin de pouvoir simplement se consacrer à leur discipline. Ainsi en est-il d’Hélène d’Œttingen, dite Roch Grey, l’« Écrivaine méconnue » de ce numéro que présente Patrick Bergeron.
En avril 2011, David Lonergan inaugurait avec l’œuvre de France Daigle une nouvelle rubrique de Nuit blanche consacrée aux figures actuelles des littératures des communautés francophones canadiennes. Notre collaborateur, « Acadien d’adoption », s’intéresse cette fois-ci au poète et explorateur des arts visuels Daniel Dugas dont le recueil Au large des objets perdus vient tout juste de paraître.
La plume – celle de Jean-Paul Beaumier – a semble-t-il été sérieusement infléchie par la consultation de la Typographie inusuelle d’aucune aide pour les gens qui rédigent & fabriquent des imprimés de toutes sortes. Un abécédaire « pantanellasque » !
Suzanne Leclerc
1. Charles Darwin, Voyage d’un naturaliste autour du monde, La Découverte, Paris, 2006, p. 223.