À la demande du magazine bostonien Atlantic Monthly, Bernard-Henri Lévy a parcouru les États-Unis dans les pas d’Alexis de Tocqueville, quelque 160 ans après la parution du classique des sciences sociales De la démocratie en Amérique. Regroupant les chroniques tirées de ce périple, American Vertigo a créé un précédent, puisqu’il a d’abord paru en version traduite. Lévy n’était pas un inconnu pour le lectorat américain, son précédent livre, Qui a tué Daniel Pearl ?, ayant fait beaucoup de bruit parmi les intellectuels. Cette fois, Lévy relate sa rencontre avec Jim Harrison, Sharon Stone et un John Kerry entouré d’attachés de presse francophobes. Il s’entretient avec des activistes commémorant les victoires antiracistes de l’Alabama. Il visite les prisons de Rikers Island, Alcatraz et Guantánamo. À Salt Lake City, il s’intéresse au centre d’archives des mormons. Sun City West (Arizona) lui fait l’effet d’un jardin d’enfants pour vieillards, et New Orleans, d’un refuge pour marginaux. À San Diego, près de la frontière mexicaine, il fait la connaissance d’un brigadier qui traque les clandestins dont il est pourtant le descendant. Les critiques négatives ont plu sur American Vertigo, qui n’est pourtant pas un si mauvais texte. Lévy veut désamorcer l’antiaméricanisme « pavlovisé » de ses compatriotes, mais son livre ne vaut pas L’obsession anti-américaine (Plon, 2002) de Jean-François Revel. Le pire défaut d’American Vertigo réside peut-être dans sa structure. Les trois quarts du livre sont un carnet de voyage où l’auteur s’imprègne, à sa manière, de la réalité américaine, alors que le dernier quart est constitué d’un épilogue trop long présentant les conclusions de l’enquête. American Vertigo risque d’en décevoir plus d’un parce que Lévy se base sur des généralités, sans faire preuve de l’intuition du détail révélateur qui fait tout l’intérêt des écrits de voyage. L’auteur étaie ses opinions sur des observations rapides et incomplètes, comme un bordel aseptisé du Nevada servant, à travers la rencontre d’une seule prostituée, de baromètre sur la sexualité des Américains. Lévy aime parler de lui-même et de ses marottes. Au lieu du road book promis dans les premières pages, il dresse le portrait d’une Amérique vue derrière la vitre d’une limousine.
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