Sarah Wode-Douglas, une éditrice de poésie anglaise, part en Malaisie dans l’espoir de résoudre un drame familial. À Kuala Lumpur, elle fait la connaissance d’un étrange réparateur de bicyclettes, Christopher Chubb, qui se révèle être lui-même un poète et, surtout, l’auteur d’un canular qui a défrayé la chronique australienne des années auparavant. Il a « inventé » un poète, John McCorkle, et écrit son œuvre. Le malheur, c’est que sa poésie fut saluée par la critique comme celle d’un génie et que la supercherie allait entraîner la mort de son éditeur.
Subjuguée à son tour par la lecture d’un extrait de cette « fausse » œuvre, l’éditrice devra écouter la chronique de Chubb pour avoir le privilège, espère-t-elle, de publier les poèmes de McCorkle. Elle apprendra ainsi, et nous avec elle, qu’un jour, McCorkle s’est présenté en chair et en os chez son créateur et lui a ravi son enfant. Dès lors, Chubb n’aura de cesse de chercher sa fille, pourchassant, pendant des années, son ravisseur de Sydney à Singapour, de Kuala Lumpur jusque dans la jungle malaisienne. Ce sont les péripéties de cette recherche qui composent l’essentiel du roman.
Comme dans ses autres romans, Peter Carey brode autour de son sujet principal de nombreuses intrigues secondaires qui, loin de ralentir le récit, le nourrissent et tiennent le lecteur en haleine. En outre, Peter Carey peint des personnages qui composent une humanité sans pareille, loin des stéréotypes et des personnages conventionnels. Bref, Ma vie d’imposteur est une vraie réussite.
Peter Carey a construit son romansur le jeu des apparences. Par son art, il réussit à élever son intrigue à la hauteur d’une métaphore sur la création artistique. Quel est le rapport du créateur avec sa création ? Quelle est la part de vérité et de mensonge dans une œuvre ? En définitive, à qui appartient l’œuvre d’art ?
On a dit de Peter Carey qu’il était le plus grand écrivain contemporain de langue anglaise. On ne saurait dire si cette consécration est méritée ou pas. Toutefois, on peut affirmer que par l’intelligence de leur construction, la puissance du souffle qui les anime et l’extraordinaire invention dont ils font montre, les romans de Peter Carey s’inscrivent dans la lignée des grands romanciers du XIXe siècle anglais.