Paru en 2008 chez l’éditeur milanais Arnoldo Mondadori, La solitude des nombres premiers a rapidement raflé les honneurs en Italie. Il a en effet valu à son auteur le prestigieux prix Strega. Or, Paolo Giordano n’avait que 26 ans au moment de la publication de son livre. L’âge moyen des lauréats du « Goncourt italien » est, on s’en doute, bien plus élevé. Ainsi Pietro Citati a reçu ce prix à 54 ans, Umberto Eco à 49 ans et Primo Levi à 60 ans. C’est donc un jeune talent immensément prometteur que laisse entrevoir cet étonnant premier roman.
Le roman de Giordano surprend effectivement par la sobriété et l’assurance de sa narration. L’on y suit, au fil de trois décennies, l’itinéraire de deux personnages meurtris et solitaires. D’un côté, Mattia Balossino est un jeune mathématicien surdoué qui a développé la manie de se mutiler après la tragique disparition de sa sœur jumelle Michela survenue pendant leur enfance. D’autre part, Alice Della Rocca est une jeune photographe souffrant d’anorexie et qu’un accident de ski a laissée boiteuse. Les « nombres premiers », ce sont eux, Mattia et Alice, divisibles seulement par un et par eux-mêmes, mais possédant un alter ego dont il ne sont séparés que par un nombre pair. Au lieu d’une conventionnelle histoire d’amour, c’est le récit d’une fascinante amitié que raconte le romancier turinois avec une exploitation magistrale de son matériau romanesque. Des personnages étoffés et un brin mystérieux, une intrigue originale et resserrée, une prose agile et limpide Manifestement, Paolo Giordano est un nom à retenir.