Depuis quelques années, le milieu slam est parvenu à sortir du territoire marginal dans lequel il était confiné, pour gagner progressivement en popularité. De plus en plus, on organise des happenings où la poésie est mise à l’honneur dans le cadre singulier de joutes oratoires où le public est convié à participer en tant que jury. Certains slameurs, comme Grand Corps Malade, se font même connaître par l’entremise de l’industrie du disque. Préparée par André Marceau et Anne Peyrouse, cette anthologie, regroupant les textes de douze slameurs, arrive donc à point. Il s’agit, en fait, du premier ouvrage du genre à rendre compte de la vivacité de la scène slam au Québec, et sans hésitation, l’effort mérite d’être salué. Pourtant, certains pourraient remettre en question le bien-fondé d’un pareil recueil. On le sait, le slam se proclame comme un mode « vivant » de la poésie, et s’oppose, à cet égard, à la poésie imprimée. Toutefois, et Marceau le souligne, « [l]a publication de textes voués au slam, en les extirpant de leur partie vitale (l’occurrence scénique), permet [ ] de focaliser sur cette différence, qui se manifeste de façon différente selon les poètes ». Or, à la lecture (à haute voix, bien entendu) de l’ouvrage, on remarque que cet écart relève en grande partie d’une approche très sonore et très rythmée de l’écriture, et d’un façonnage langagier qui parfois atteint un niveau de virtuosité étonnant. Sur le plan thématique, les textes se révèlent souvent très ludiques, mais aussi socialement et politiquement engagés. Même si ces textes, disons-le, ces poèmes, partagent des traits communs, le slam n’est pas pour autant un genre en soi. Il convient, à ce sujet, de mentionner la très éclairante préface d’André Marceau, qui, en plus de fournir un mini-historique sur cette pratique poétique, pose les balises d’une discipline que bien des gens ne savent pas encore définir correctement. Soulignons également que ce livre, comme l’indique son sous-titre, s’intéresse à la scène slam de la seule ville de Québec. Souhaitons pour l’avenir qu’un pareil ouvrage, dont le contenu couvrirait l’ensemble du Québec, soit publié.