Lauréat du prix Canada-Japon 2008 pour le récit de voyage Marcher le silence, Carnets du Japon, écrit conjointement avec André Girard, André Duhaime est poète, directeur littéraire de revues sur le haïku et professeur de français langue seconde. Séjours, son dernier recueil solo de haïkus, suit près d’une vingtaine d’œuvres poétiques collectives et individuelles.
Par le moyen de haïkus, fragments d’une réalité figée dans le temps, Séjours nous fait voyager tantôt à Toulouse, tantôt à Marseille. Ce recueil comporte deux parties distinctes : la première, filée d’un haïku à l’autre, narre un voyage vers une fille distante ; la seconde, construite de tankas indépendants les uns des autres, se compose de petites bribes d’histoires, de moments entiers saisis au vol lors d’un second voyage, saupoudrés d’emprunts à différents classiques de la poésie, de la musique et du cinéma, à la façon du « honkadori » japonais.
À quelques rares occasions, l’écriture se fait un peu hermétique, mais le plus souvent elle est riche en jeux de mots doux et inédits, accessibles au lecteur néophyte. Allitérations et assonances, inspirés de Mallarmé dira Duhaime, nous enivrent au point de nous faire revenir sur certains textes pour les lire lentement à voix haute. Maître du haïku et parfois animateur d’ateliers, Duhaime se permet certaines libertés occidentales dans cet art qu’il s’est approprié. Demeurant fidèle à l’esprit traditionnel du haïku, il évite tout de même de tomber dans un formalisme à outrance.
Sa plume parfois coquine, parfois contemplative, esquisse avec doigté un mouvement inattendu, presque fortuit, comme la tôle d’un avion qui s’assouplit après la fatigue d’un long trajet On sent le voyage au fil des pages, les textes respirent, certains sont d’une lente beauté. Le livre est finement structuré, dans une édition d’une grande beauté.
Bref, Séjours m’apparaît comme un joyau poétique sage et brillant, à feuilleter maintes fois.