S’il est vrai que le fantastique existe depuis la nuit des temps, il semble particulièrement présent dans les temps modernes alors qu’il envahit non seulement la littérature, la peinture et la musique mais tous les nouveaux modes d’expression : BD, jeux vidéo, À lire l’ouvrage de Simone Grossman, on se rend compte comment le fantastique a suscité l’intérêt de part et d’autre du processus de création : chez le créateur d’une part et chez le « consommateur » d’autre part, par la transmission du premier au second de sensations diverses pouvant aller de la peur à la fascination.
Si le fait se constate dans le monde entier, il pouvait l’être aussi au Québec et il l’est en effet. La preuve est que depuis 1984 y a été créé le Grand Prix de la science-fiction et du fantastique, qui est venu confirmer la vitalité du genre constatée depuis les années soixante et qui, sans doute, découle tout droit d’une tradition de contes fantastiques transmis oralement puis consignés dans des recueils et périodiques à partir du dix-neuvième siècle.
Simone Grossman connaît bien, pour en avoir fait le sujet d’études approfondies, les relations entre peinture et littérature dans le surréalisme et le fantastique. Passant en revue les opinions de différents théoriciens du genre et des récits d’écrivains québécois connus, l’auteure met l’accent sur le regard et son immense possibilité de « dé-faire » le monde visible en allant à l’encontre de la perception ordinaire. Le regard dirige l’œil, on le sait. Et si l’œil venait à exister de manière autonome, hors du corps ? Et si l’œil, celui crédible (en principe) de la caméra, venait donner un caractère véridique à ce qu’il y a de plus étrange ? Tout peut alors arriver.
Imaginez ensuite que l’on puisse « voir et être vu à la fois ». Imaginez dans une telle situation un spectateur-auteur et une œuvre peinte. Là encore, tout peut arriver. Tout arrive, croyez-le.