Entre la Syrie et le Japon, l’Indonésie et le Laos, les Petites géographies orientales de Mélanie Vincelette nous convient, au-delà de l’exotisme des images, sur des chemins de pudeur et de silence. Ces silences infinis qui peuplent l’espace, les êtres et cette infime vibration qui les lie.
Chez Mélanie Vincelette, le cœur est silencieux. Dès le premier récit, « Le fantôme affamé », le ton est donné : une jeune femme suit dans les rues de Singapour, sans presque lui parler, un homme aimé qui doit la conduire à travers l’Asie du Sud-Est jusqu’au Laos où elle épousera son meilleur ami, un Laotien émigré en France. Même affiché au grand jour, l’amour, sous quelque forme que ce soit, reste impossible, voué à l’échec et au mutisme. Ainsi, dira la narratrice, avant le départ de sa meilleure amie pour son voyage de noces : « Alexandra y sera avec son mari. Et, sur le bac qui relie Vinh Long et la route de Saigon, ils n’auront déjà plus rien à se raconter » . Et cette même narratrice retient aussi les mots qu’elle voudrait dire ou écrire à son amie puisqu’il y a des choses qu’il faut garder pour soi
Peut-être le dernier des quinze récits du recueil détient-il la clé de tous ces mots enfouis ? Dans « Pour que tu retrouves toujours le chemin vers chez toi », la narratrice, qui séjourne à Bangkok, apprend au téléphone la mort accidentelle de son frère. « Il n’y a jamais eu, dans ma vie, de silence aussi irrespirable que celui-là », dit-elle.
Certains personnages apparaissent dans nombre de récits du recueil, lui donnant ainsi des allures de roman fragmenté. Quelques lecteurs reconnaîtront aussi sans doute des textes déjà publiés dans des revues littéraires du Québec, de la France et de la Belgique.
Émouvantes variations sur les silences du cœur, ces Petites géographies orientales font néanmoins entendre une voix particulière : celle de Mélanie Vincelette.