Réunissant les textes commémoratifs de la Grande réunion des écrivains francophones du Canada et d’autres pays lors du huitième Salon du livre de Toronto tenu des 12 au 15 octobre 2000, ce livre (dont la mise en pages laisse gravement à désirer) inclut le meilleur et le pire, des contributions respectueuses et d’autres manifestement préparées sur le coin d’une table à café. À côté de très beaux textes ‘ entre autres, ceux de Abelkader Djemaï, Majid El-Houssi ou Félix Molitor ‘, on en trouve plusieurs autres qui laissent plus que songeur.
Retenons donc le meilleur et partons avec Lorraine Desjarlais du fait que les termes mondialisation et globalisation ne sont pas synonymes, le premier, contrairement au deuxième, n’incluant pas les cultures, même si les pratiques qu’il désigne ont des effets massifs sur elles. Jacques Godbout rappelle d’ailleurs dans ce contexte que ce n’est pas la mondialisation qui menace le précaire équilibre de nos sociétés, mais le capitalisme sans frontières des transnationales et des financiers, la guerre par le commerce. Jean-Claude Masson insiste sur la nécessité de distinguer entre le multiple et le divers : « On ne peut superposer la béarnaise, la sauce chinoise aux huîtres et la sauce espagnole à l’encre de poulpe ». Belle manière de préciser que nous ne gagnons rien à démoniser les pratiques, les métaphores et les métonymies de la mondialisation (qui ne saurait être confondue avec l’américanisation) et qu’il est peut-être préférable de nous interroger sur les grands enjeux actuels en revenant à une perspective phylogénétique et ethnologique : « Pourquoi mesure-t-on le monde à l’estomac de celui qui le mange ? En somme, pourquoi la barbarie est-elle devenue une norme ? » Ce sont là les heureuses questions de Jean Bédard, lesquelles ont l’avantage de remettre en lumière la pulsion anthropophagique de l’humanité et de ramener ainsi le problème crucial de l’identité.
Une fois oubliés les incontournables messages-bidons des politicailleurs invités comme pique-assiettes, on pourra glaner ça et là quelques lignes inspirées. On pourra toutefois difficilement éviter les conneries comme celles de Bob Rae, bien représentatives de la ploutocratie : « Lorsque le maire de Shangai rencontre celui de Montréal, ils se comprennent tous deux instantanément, sans égard aux barrières linguistiques ou politiques. » Vaut-il même la peine de commenter ?