Après avoir exercé pendant trente ans le métier de réalisateur d’émissions télévisées, François Jobin se consacre maintenant à la littérature. Mensonges et autres tromperies est sa quatrième publication.
Chacune des neuf nouvelles du recueil s’avère un bijou d’invention. Les personnages n’ont pourtant rien d’exceptionnel. Mais fin observateur, François Jobin sait débusquer chez eux la faille – honte, aveuglement volontaire, peur de perdre la face, rationalisation, envie, snobisme – qui en fait des types criants de vérité. Il y a bien une exception, avec ce personnage du texte intitulé « Le tunnel », auquel on s’identifie, la peur au ventre, avant de comprendre que l’on a été mystifié. Surprise totale. Tromperie d’un narrateur bien de son temps.
De façon plus transparente, la première nouvelle, « Un beau mensonge », illustre la part qui revient à la fabulation en littérature, car « [q]ui dit la vérité n’invente rien, cela va de soi », d’affirmer le narrateur avant de raconter, en ayant soin d’en rajouter, l’histoire de la fourberie dont il a été l’auteur à l’époque du jardin d’enfants. D’autres montrent l’hommerie en germe chez de jeunes garçons, tel ce « Roi des poulets », à peine cinq ans lui aussi, qui découvre son pouvoir sur un animal : le plaisir ressenti tout à coup à le faire souffrir et le mensonge qui s’ensuit, gravant en lui un souvenir honteux. Et ce passionné de livres, « L’amateur », qui s’enhardit en multipliant ses larcins, fait lui aussi mentir l’adage selon lequel la vérité sort de la bouche des enfants.
Jobin excelle à manier l’ironie quand, par exemple, il souligne l’absurdité des mensonges que l’on s’invente à soi-même, comme dans « L’escorte », alors que le jeune homme fait fi de sa dignité en se persuadant qu’il n’y a pas de sot métier, et l’aveuglement de ce personnage obèse d’« Écarlate », à qui le médecin vient de dire qu’il court à grande vitesse vers la mort, et qui va d’une boutique à l’autre pour se procurer toute une pharmacopée de remise en forme et s’équiper de pied en cap avant même l’amorce du premier exercice. La plupart du temps, le nouvelliste attend son lecteur au détour pour le surprendre avec des cocasseries, ou une chute étonnante.
D’une plume experte, Jobin signe ces Mensonges et autres tromperies dans la plus pure tradition de la nouvelle.