Ce livre multimédia paraît dans la collection « L’instant ciné » des éditions de L’instant même, dans une nouvelle série intitulée « Les mystères urbains ». André-Philippe Côté est un caricaturiste au quotidien Le Soleil et un auteur prolifique de bandes dessinées (pensons à sa série Baptiste). Mira Falardeau a déjà fait paraître une excellente Histoire du cinéma d’animation au Québec (Typo, 2006) ; elle vient en outre de publier une remarquable Histoire de la bande dessinée au Québec (VLB, 2008), dont il faudra reparler plus tard.
L’oreille coupée et autres scénarios regroupe six courts récits qui se présentent comme de brefs exercices de style en scénarisation. Chacune de ces histoires satiriques s’apparente à un scénario, à un storyboard, à un découpage technique ou à un roman-photo. En ouverture, « Anron » raconte sur un ton léger le geste suicidaire d’un homme ayant tout perdu (on imagine un rapprochement avec la faillite de la compagnie américaine Enron). Le scénario « Le voyeur » est un court récit sans dialogues, avec un texte descriptif et seulement quelques dessins. Puis, « Les gratteux » est présenté en deux versions successives que l’on peut comparer : une bande dessinée et un découpage. Ensuite, « Jour bleu » décrit un épisode de ce que je nommerais du « harcèlement sexuel inversé » : une femme tente par des moyens malhonnêtes de séduire un homme qui lui résiste. Ce récit est présenté en trois états : un texte subdivisé en scènes, un storyboard crayonné et un roman-photo. Illustré par Jean-François Bergeron, le sixième récit, « L’oreille coupée », est complété par un cédérom (inclus). Dans cette histoire, un homme vivant seul apprend que son épouse a été prise en otage, alors qu’il n’a jamais été marié. Sur le plan formel, c’est le récit le plus recherché et le plus accompli de l’ensemble, surtout dans l’animation sur cédérom.
L’intérêt de ce recueil se situe principalement dans la créativité et ses prolongements techniques sur le cédérom. Les textes en soi sont en revanche assez pauvres. Ce livre conviendrait peut-être à des étudiants en cinéma ou en scénarisation, mais, compte tenu du niveau de langage et de la sensualité de certains passages, ils n’est certainement pas à mettre entre les mains des enfants : nous sommes loin de l’innocence de Tintin ou de Jo, Zette, et Jocko !