Comédie grave, c’est ainsi que la pièce de l’auteur saguenéen, Pierre-Michel Tremblay, est qualifiée. C’est bien trouvé.
D’un côté, on a une réalité fatale : la mort inéluctable, apportée par le cancer. De l’autre, on a une urgence de vivre pleinement le temps qu’il reste : le voyage.
On se retrouve dans l’univers de Pénélope Bouchard, de Chicoutimi-Nord. Rien que les noms, déjà, annoncent le ton humoristique de l’auteur malgré la lourdeur du sujet.
Pénélope a décidé de voyager à travers le monde, d’aller voir ce qu’elle a toujours voulu voir avant de mourir. Dans son périple, elle écrit des histoires. Elle demande ensuite à son amoureux comédien, Alex, de jouer ces histoires au théâtre.
C’est ainsi que les choses nous sont présentées au début de la pièce, par Alex lui-même. Il est accompagné d’un chœur, ses amis comédiens, ils vont suggérer, discuter un brin, questionner la démarche, chercher les motivations, nous expliquer, l’air de rien.
On se retrouve ensuite à Londres, car c’est un Anglais qui a écrit l’histoire préférée de Pénélope, Alice au pays des merveilles. Puis en France, au cimetière du Père-Lachaise, où elle cherche la tombe de Molière, car c’est en jouant Le malade imaginaire au cégep qu’elle a rencontré Alex. Puis en Bretagne, et même en Grèce où on assiste au retour d’Ulysse, vu par Pénélope Bouchard de Chicoutimi-Nord. Le plus drôle, c’est que Tit-Coq débarque au milieu de tout cela, fier d’avoir été le sujet choisi par Pénélope pour son doctorat. Il est mythique, tout comme Ulysse, et s’en réclame.
À travers chaque histoire, Pénélope rencontre des gens incroyables, vit des expériences qui sortent de l’ordinaire, dit et entend dire des choses remplies de sens ou carrément délirantes. Tout est démesuré, une vie absurde qui n’a d’égal que l’absurdité de la mort, mais qui, tout comme elle, se veut à l’emporte-pièce !
La lucidité de Pénélope est à la fois la chose la plus gaie et la plus triste dans tout cela. A-t-elle vraiment fait ces voyages ? Non. C’est au Saguenay, à Sainte-Rose du Nord, dans la maison de son grand-père, qu’elle a écrit toutes ces histoires avant de finir ses jours.
Le vrai voyage, c’est Alex qui le fera pour Pénélope, en Grèce : il ira revoir le village de Paléas Épidavros et y regardera pour elle ce qu’Homère avait joliment baptisé : Le rire de la mer, ces petits éclats de lumière qui dansent sur les vagues.
Pierre-Michel Tremblay nous offre là une pièce intelligente, sensible, à la fois dure et tendre, suscitant le rire comme les larmes.