Boris Akounine, en réalité Grigori Chalvovitch Tchkhartichvili, est né en 1956 d’un père géorgien, comme son nom l’indique, et d’une mère russe. Il habite Moscou depuis 1958. Avec Le monde entier est un théâtre, l’auteur des best-sellers les plus lus en Russie, traduits en dix-huit langues, publie une douzième aventure d’Éraste Fandorine, fantasque détective que les critiques se plaisent à situer entre Sherlock Holmes et Hercule Poirot, avec peut-être un zeste d’Arsène Lupin.
Si les références à Fandorine semblent empoussiérées, c’est que le roman se situe en 1911 à Moscou, peu avant la Première Guerre mondiale et la révolution d’Octobre. Il y règne une atmosphère surannée, faite de politesse exquise, d’un amoureux transi et d’une jeune, très jeune, damoiselle en détresse. « Je suis amoureux, s’était dit tout à coup cet homme de cinquante-cinq ans, qui en avait vu et enduré au cours de son existence. »
L’auteur et le personnage s’intéressent tous deux à la politique de leur pays, avec un siècle d’écart. Si l’écrivain Akounine est à couteaux tirés avec le président Poutine, le protagoniste Fandorine s’interroge sur le sort de la Russie de son époque. « L’immense empire déjà accablé d’une multitude de problèmes vacillait et oscillait […] Piotr Stolypine pesait trop lourd pour l’État. »
La recherche du détective l’amène non seulement à écrire une pièce de théâtre afin de séduire sa belle, intitulée pompeusement Deux comètes dans un ciel sans étoiles, mais à poursuivre – avec ou sans l’aide de son fidèle valet de chambre japonais Massa – les truands qui veulent du mal à sa dulcinée.
L’intrigue tourne autour du théâtre russe du début du XXe siècle et nombreux sont les clins d’œil aux Tchekhov, Gogol ou Stanislavski, dramaturge à l’origine du célèbre Actors Studio de New York. « Je suis théâtrocentriste. Pour moi non seulement le monde entier est un théâtre, mais le théâtre est le centre de l’univers, son modèle idéal », affirme Novimski, un des personnages-phares du roman.
Époque, lieux et mentalité slave font du livre un amusant passe-temps, malgré le cabotinage des personnages et l’écriture vieillotte qu’Akounine a privilégiée, longueurs et digressions incluses. Un thriller d’aujourd’hui à la sauce d’hier