Henrik Gansberg van der Noot est conseiller du roi. Du roi des Belges Léopold III. Nous sommes en 1950 et celui-ci devra bientôt abdiquer parce que dans la rue, la colère gronde.
Mais ces éléments historiques ne sont qu’une trame de fond au drame personnel et fictif que voici : M. le conseiller a séduit une fille « du peuple » qui a environ trente ans de moins que lui. Apprenant, quelques semaines plus tard, qu’elle est enceinte, il propose de l’héberger, avec l’enfant, dans la résidence secondaire où, depuis longtemps, il se retire loin de sa femme et de ses enfants toutes les fins de semaine. Un soir, pour protéger sa maîtresse, il s’en prend à un rôdeur, qui se retrouve raide mort sur son gazon. Que faire ?
Armel Job, professeur de lettres classiques, maîtrise l’art du roman : il nous sert une psychologie des personnages bien sentie mais sans excès, plusieurs pointes d’humour et un déroulement logique régulièrement ponctué de flashbacks jamais trop longs et toujours pertinents. Son style, sans être hautement littéraire, est tout de même relevé, imagé et vivant sans être cabotin.
En fait, on pourrait presque dire qu’il réussit le tour de force de nous offrir une saga en moins de 300 pages. Les personnages sont relativement nombreux (bien qu’on ne s’y perde jamais) et, de chapitre en chapitre, on découvre toujours de nouveaux pans de leur histoire personnelle, et souvent de nouveaux liens entre eux, qui leur donnent de la profondeur et présentent sous un jour nouveau une histoire dont la forme et le sens ne cessent d’évoluer au fil des décisions des personnages, des réflexions qu’ils se font, des gestes qu’ils posent.
Par ses quiproquos et ses enchevêtrements de situations, Le conseiller du roi relève presque du vaudeville. Pourtant c’est bel et bien d’un drame qu’il s’agit et, bien qu’il ne cherche jamais à arracher inutilement une larme au lecteur, c’est avec beaucoup de sensibilité et de respect pour les destins de ses personnages qu’Armel Job nous plonge dans la vie d’un petit village de l’après-guerre en Belgique.