Une lutte à finir pour le personnage de Québec. Un destin tragique. Il nous met en garde dès le début de la pièce : son histoire ne finit pas bien. Québec est en prison parce qu’il a frappé presque mortellement une femme qui l’a jaugé avec mépris alors qu’il demandait son chemin, à Paris. Elle n’a pas répondu, elle ne répondra plus. Dépassé par sa propre violence, il tente de comprendre comment il a pu en arriver là. « Juste des merdes pelletées par-dessus d’autres merdes, entassées dans des recoins de moi, en années de décennies, qui m’ont laissé un goût amer. »
La pièce se divise en dix rounds de boxe à travers lesquels il se raconte. Une confession extrêmement émouvante et éprouvante, où il revoit ses jeunes années, où « bâti comme un cheval », on lui prédisait, pour ne pas dire imposait déjà, un avenir de boxeur. On s’attaquait à lui parce que c’était plus facile : il était gros, on était sûr d’atteindre la cible.
Plusieurs personnages apparaissent sur le ring servant tour à tour de plateforme de combat et de prison. La mère vient pleurer sa détresse là où son fils purge sa peine ; le França, compagnon de cellule, tantôt narguant, tantôt protégeant ; Barreau, le gardien qui parie sur lui lors des combats ; le père, mort, atteint d’Alzheimer, qui ne lira jamais un poème qui lui était destiné ; Muhammad Ali, son entraîneur, dont la folie et la démesure sont l’inspiration et enfin Liverpool, par lequel la violence plonge dans la cruauté sadique.
Québec nous livre son mal-être, le mal de la différence. Un récit bouleversant, truffé de métaphores, une pièce au ton poétique rendant possibles les images dures qui restent collées à notre imaginaire. Patric Saucier, auteur, metteur en scène et comédien, n’en est pas à son premier texte dramatique, mais c’est avec Le boxeur qu’il assumera ses trois rôles, en partageant, seul en scène, sa « thérapie du coup de poing ».