La perspective d’ensemble que suggère le titre de cet ouvrage appelle d’abord une remarque importante. Quoiqu’on puisse y retrouver, par exemple, des éléments pour la compréhension de certains bouleversements en cours dans nos sociétés, ce dont il est question ici sur le plan politique concerne exclusivement les traditions, l’expérience et la pratique de la gauche révolutionnaire en Amérique latine. En conséquence, le livre de Marta Harnecker s’adresse à une famille politique spécifique en tant que contribution à l’« art de construire une force sociale antisystémique ».
Conçu comme une sorte de manuel – chaque idée ou développement fait l’objet d’un paragraphe numéroté (1401 au total) –, La gauche à l’aube du XXIe siècle est une vaste synthèse qui retrace dans un premier temps la trajectoire récente de ce courant politique largement inspiré par la révolution cubaine. Dans un second volet, l’auteur se penche sur les transformations actuelles du capitalisme, sur ses fondements structurels ainsi que sur les effets sociaux des politiques néolibérales qui marquent profondément le processus de mondialisation. Ici, c’est surtout à un résumé descriptif des thèses de différents auteurs que se livre Harnecker dans ce travail qui vise à se réapproprier les moyens théoriques d’une analyse critique. Enfin, la dernière partie effectue un bilan politique doublé de l’élaboration de nouvelles pistes pour renouveler la réflexion et la pratique de la gauche anticapitaliste. En partant du constat de la crise plurielle (théorique, politique, organisationnelle) de la gauche, l’auteur plaide pour une refondation de l’analyse de classe et pour l’instauration de nouvelles pratiques dans la construction d’une alternative. À cet égard, les enseignements concrets qu’Harnecker dégage de l’expérience des gouvernements locaux sous l’influence du Parti des Travailleurs au Brésil constituent une confirmation de la pertinence des réflexions qu’elle nous soumet.