Raymond Queneau disait que « c’est en lisant que l’on devient liseron ». C’est aussi, en lisant, que l’on prend parfois le risque d’être renversé par un texte. C’est encore plus frappant lorsqu’il s’agit d’un texte de théâtre, et de théâtre pour enfants de surcroît ! Stephan Cloutier, auteur et comédien diplômé du Conservatoire d’art dramatique de Montréal, a réussi cet exploit dans un texte dramatique qui s’adresse au cœur et à l’intelligence des plus petits comme des plus grands, et ce, sans excès d’aucune sorte.
Fuego, c’est d’abord le nom d’un petit dragon qui a perdu, aux mains d’un méchant sorcier, son bien le plus cher, le plus personnel : son feu ! Fuego, c’est aussi l’histoire d’Axia, une petite elfe abandonnée en forêt, et de Nathan, un jeune garçon qui quitte sa famille à la recherche de « son » épée pour devenir un « preux chevalier ». Le sort (un mauvais sort ?) réunira ces trois personnages qui s’entraideront et réussiront là où les adultes ont échoué.
Malgré une simplicité apparente, la fable de Stephan Cloutier offre un contenu qu’un jeune public pourra aisément comprendre et suivre, sans ramener le niveau du discours au plus bas dénominateur commun, et que les amateurs de psychanalyse et/ou de symbolique pourront s’amuser à décortiquer. La diversité des thèmes, loin de diluer l’unité du drame raconté, permettra, au contraire, d’intéresser plus d’un spectateur. De plus, ce n’est pas seulement ce qui nous est raconté ici qui séduit. En effet, les personnages, autant la jeune elfe que le jeune garçon, pour ne prendre que ceux de forme humaine, ne sont – contrairement à tout un pan de la littérature jeunesse – pas stéréotypés. La jeune elfe n’est pas toute-puissante et le jeune garçon est loin d’être simplet, elle n’est ni victime ni héroïne infaillible et il n’est ni un être ultra-puissant ni un estropié émotif. Ils ont besoin l’un de l’autre et ne manifestent ni arrogance, ni omniscience sarcastique, même lorsqu’ils ont raison là où les adultes ont tort Fuego propose donc un respect mutuel entre les êtres qui nous repose des mondes où les méchants sorciers semblent parfois bien nombreux.