Vásquez Montálban Il ne sera pas facile de trouver mieux. Il ne sera même plus possible de gloser à propos des ratés de la révolution cubaine sans faire intervenir dans le débat telle ou telle entrevue de Manuel Vásquez Montálban. Apprécié à juste titre pour son policier Pepe Carvalho (et ses talents culinaires), l’écrivain confirme le talent déjà étalé dans Galindez : il est un maître de l’enquête sociale et politique, un journaliste en totale maîtrise des règles et des exigences du journalisme d’enquête.
Montálban prend prétexte de l’étonnante visite de Jean-Paul II à Cuba pour soumettre Fidel Castro et son île à une batterie de questions. Les angles d’attaque sont nombreux : qu’est devenue la révolution ? Les Cubains mangent-ils à leur faim ? Que penser de cette La Havane dissidente qui hurle à Miami ? Quelle est la relation entre le susceptible pouvoir personnel de Fidel et les intellectuels de l’île ? La mère-patrie, l’Espagne, traite-t-elle Cuba autrement que les autres pays ? L’urbanisme de La Havane résulte-t-il d’une vision austère ou préserve-t-il les traditions chantantes de la révolution tropicale ? Autant de dossiers que Montalban ouvre, étoffe, stylise. Son enquête le mène au Vatican, à Miami, à la cour d’Espagne, elle met à contribution les contacts établis au cours d’une fabuleuse carrière de romancier et d’incorruptible enquêteur. L’humour attendu du créateur de Pepe Carvalho trouve pourtant à se loger. Comment ne pas sourire quand l’énigmatique sous-commandant Marcos fait savoir, du fond de son Chiapas, qu’il ne lit plus les aventures du détective gastronome parce qu’elles aiguisent un peu trop sa faim ? Et il faut lire la réponse de Montálban.
Un modèle de professionnalisme, d’équilibre établi à égale distance de la question grossière et de la complaisance, de culture et d’élégant savoir-vivre.