Avec ce recueil collectif, René Audet entend combler un trou important dans les études littéraires, en s’intéressant, avec d’autres (Jean-François Hamel propose presque simultanément lui aussi un collectif sur la même question), à l’évaluation des pratiques actuelles de la littérature en vue de cartographier les usages spécifiques au contemporain dans les œuvres francophones. À partir de l’examen de textes puisés dans les corpus français (à très forte majorité), québécois et franco-ontarien, les auteurs cherchent à qualifier cette tranche spécifique de la littérature, en postulant des modifications dans le rapport à la transmission, à la temporalité et aux fonctions heuristiques propres au littéraire. Ce faisant, ils singularisent une durée en regroupant des pratiques maintes fois lues dans leur éclatement, leur disjonction et leur pluralisme. L’entreprise, en ce sens, est plus que bienvenue, dans la mesure où elle trame des fils entre ce qui est généralement tenu comme trop disparate pour mériter ce type de catégorisation. Elle est aussi risquée, puisqu’elle s’élabore sans clôture finale, qu’elle fait face à une réelle diversité d’énonciations et d’interventions et qu’elle se réalise dans un contexte où les modifications de la réception du littéraire sont nombreuses et susceptibles de changer le rapport à la lecture (Internet, livres électroniques ; il est d’ailleurs dommage que ces éléments n’aient pas été abordés par ce collectif, parce qu’ils qualifient aussi le contemporain).
Chacun des textes du recueil vise à présenter une approche représentative de la multiplicité du contemporain, à faire valoir une pratique emblématique de la littérature actuelle, que ce soit autour des filiations (Simon Auclair, Maude Poissant, Marilyn Brault), des nouvelles formes de la représentation ‘ néo-réalisme chez Michel Houellebecq (Pascal Riendeau), récit-poème chez Patrice Desbiens (Myriam Lamoureux), autorité narrative (Frances Fortier et Andrée Mercier) ‘, des genres (le policier pour Patrice Michaud et le théâtre pour Marie-Christine Lesage). Si l’ensemble est inégal (Brault, Fortier/Mercier, Michaud du côté positif, l’échevelé texte de Viorel-Dragos Moraru, entre autres, de l’autre côté), une certaine cohérence habite le collectif, due principalement au fait que la quasi-totalité des articles se réfère au point de vue de Dominique Viart, qui apparaît ainsi comme un maître à penser rejoignant les préoccupations contemporaines de ces chercheurs.