Courir raconte la vie d’Emil Zatopek, une légende de l’athlétisme qui a remporté, en 1952, trois titres olympiques dans le domaine de la course de fond (ceux du 5000 mètres, du 10 000 mètres et du marathon). Ce livre, malgré les apparences, n’est pas une biographie. Il s’agit bien d’une fiction, d’une construction qui, même si elle retient les événements marquants d’une vie réelle, relève de l’imaginaire.
On traverse très vite ce récit simple et linéaire qui a pour point de départ le moment où le héros tchécoslovaque découvre sa future passion. « Le doux Émile » est contraint, au début du roman, de participer à une course organisée par les occupants nazis. Il est dans un état d’esprit tout autre que celui de ses adversaires, des hommes parmi lesquels on compte un grand nombre d’Aryens bien entraînés et prêts à montrer la supériorité de leur race. À l’issue de l’épreuve, sa position au classement aura de quoi étonner.
Comme dans Ravel, son précédent roman, Jean Echenoz dresse un portrait idiosyncrasique de son sujet. Les exploits accomplis par « la locomotive tchèque » intègrent la manière d’être du personnage. Par exemple, la technique ou la manière de courir inventée par Zatopek est décrite à partir d’un jeu combinant le tempérament du grand coureur et les différents contextes qui ont façonné cet athlète. Le tout est soutenu par une écriture qui, malgré le paysage politique assez sombre, reste toujours enjouée. Ceux qui sont familiers avec Echenoz apprécieront ainsi de retrouver la touche d’humour de l’auteur. Quant aux lecteurs qui ne connaissent pas cet écrivain de chez Minuit, ce court roman, qui se lit en un après-midi, est idéal pour découvrir le romancier.