Ce que ce livre possède de charme lui vient pour l’essentiel de son personnage central, l’attachante Mireille Sansouci, alias Mimi la coiffeuse. Grâce à sa capacité d’écoute, Mimi transforme son salon en confessionnal où aboutissent toutes les rumeurs et où, inévitablement, s’affrontent les méchancetés. Jamais Mimi ne demande aux confidences de lui être utiles, jamais, non plus, elle ne se ferme aux détresses qui se dévoilent ou se laissent seulement soupçonner. Ses stratégies, parfois généreuses plus que réfléchies, ne triomphent pas toujours, mais reconnaissons à sa décharge que certaines morbidités désarmeraient même un thaumaturge. Que Mimi perde quelques batailles aux mains d’Elvira n’a donc rien d’humiliant ; pour toujours l’emporter, Mimi aurait dû s’abaisser aux cruautés de sa redoutable adversaire.
Autre atout, la présence constante d’une culture régionale tricotée serrée. Les personnages arborent les patronymes qui caractérisent le Saguenay’Lac-Saint-Jean : Tremblay bien sûr, Bouchard naturellement, mais aussi Larouche, Blackburn… L’insécurité est palpable, tant le gagne-pain dépend d’employeurs toujours menacés par l’exiguïté du marché. La fierté, jamais en reste, saisit toutes les occasions de regrouper les ferveurs ; elle veillera à ce que les fêtes du centenaire d’Hébert-Station dissipent le pessimisme qu’aurait pu répandre la fermeture de la plus importante usine de la municipalité. Tableau brossé d’après nature.
L’univers de Mimi déborde, bien sûr, les bigoudis et les teintures. La fidélité conjugale, à Hébert-Station comme ailleurs, a ses limites. Les congrès permettent l’aération professionnelle, mais aussi les décloisonnements amoureux. Mimi fera bon usage de ce que lui apprennent ses voyages et ceux de ses clientes.
Cela dit, l’écriture s’éloigne parfois des sources de l’inspiration. Les dialogues, en particulier, sont souvent ampoulés. Mimi, toujours prompte à corriger le tir, racontera sans doute ses prochaines aventures avec plus de naturel.