Au gré de 70 récits à la fois brefs et denses, ce livre virtuose trace un parcours absolument sans faille. Christoph Ransmayr, esprit curieux et grand voyageur, réunit là un trésor de moments fugaces rapportés des quatre coins du globe. Tentative aussi belle que vaine de suspendre l’évanescence des choses et des êtres.
Chacun des récits commence par « Je vis… » et le rythme ainsi créé génère une attente, peut-être un désir. L’objet, le phénomène, le personnage, l’élément sur lequel s’ouvre le récit se déploie, se démultiplie et sature bientôt l’espace vital de quelques pages. Dans un monde aux frontières estompées, Ransmayr pose un regard pénétrant sur une série de points saillants de l’espace-temps. « Je vis une silhouette lointaine devant une tour de guet » ; « Je vis une chaîne de collines noires » ; « Je vis une tombe ouverte à l’ombre d’un araucaria géant » ; « Je vis des fantômes » ; « Je vis la fine main du batelier Sang » ; « Je vis un gilet de sauvetage rouge au bord d’un champ d’épaves flottant dans l’océan Indien » ; « Je vis une femme éplorée »…
Où que l’on se trouve, quel que soit le jour, quelle que soit l’heure, l’inattendu survient. Un taureau noir lâché dans l’arène charge le rejoneador monté sur son destrier blanc : qui, du taureau ou du cavalier, sortira vainqueur de l’affrontement ? À quel moment un jeune albatros royal trouve-t-il en lui ce qu’il faut de confiance pour s’envoler au-dessus des falaises battues par la tempête ? Quel est le lien entre l’auteur et ce vieux professeur retraité que la mort vient cueillir sans crier gare, par un beau jour d’été, alors qu’il se rendait au cimetière allumer un cierge sur la tombe de sa femme ?
Ransmayr, un homme inquiet ? Possible, mais je dirais que la lecture de son atlas s’avère néanmoins une généreuse source de quiétude.
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