Les textes regroupés ici représentent les axes majeurs d’une réflexion qui renvoie à un parcours passionnant de l’historien Yvan Lamonde : l’exploration des fondements de la problématique de l’ambivalence et de l’identité au Québec. Quoique ces contributions aient déjà fait l’objet d’une publication au cours des dernières années, on doit saluer le choix de l’éditeur. Les articles ont été remaniés par l’auteur et le texte central, L’américanité du Québec, publié en 1996 dans un ouvrage épuisé, est à nouveau disponible.
Yvan Lamonde poursuit donc son entreprise de clarification de l’histoire des idées au Québec en se penchant sur la place de l’ambivalence au sein de l’identité québécoise qu’il présente comme « l’expérience d’un sentiment dualiste à l’égard d’une même question ». C’est à partir des relations entretenues vis-à-vis de multiples héritages culturels (français, britannique et américain) que l’auteur tente de cerner les situations de dépendance qui se sont succédé, la mouvance des diverses appartenances qui s’y conjuguaient et enfin les nombreux conflits qui ont pris naissance dans l’aménagement des allégeances politiques qui en résultaient. Pour illustrer cette trajectoire dans l’ambivalence, pour en identifier les jalons historiques, il fait appel aux idées et perceptions issues de l’affrontement entre figures emblématiques. Louis-Joseph Papineau et Étienne Parent ou encore Henri Bourassa et Wilfrid Laurier incarnaient dans leur discours une «bicéphalie» récurrente du rapport à la métropole. Selon l’époque, elle traduisait l’espace indéterminé entre loyalisme et anticolonialisme, entre la conciliation d’héritages diversifiés et l’affirmation d’une identité singulière, entre les situations de rupture ou d’adhésion dans le cadre de l’expérience canadienne. En fin de compte, s’il y a une ambivalence fondamentale, elle est selon l’auteur avant tout identitaire et conjugue les dimensions culturelle et politique du nationalisme québécois. Là se situe la «grande» hésitation, entre l’affirmation de droits culturels et nationaux à l’intérieur du Canada ou l’option politique du droit à l’autodétermination, débouchant éventuellement sur la formation d’un État souverain.