Beaucoup de mouvement dans cette intrigue policière. Daniel St-Onge, en tout cas, ne lésine pas sur les moyens. Le racisme entêté du Sud étatsunien demeure virulent au point qu’on le soupçonne d’avoir contribué aux dégâts de Katrina, les adultères alimentent jalousies et rancunes, les jolies femmes aguichent qui leur plaît et qui ne leur plaît pas, les attentats par colis piégés frappent en série, le FBI jette dans l’aventure ses hélicoptères de combat et ses agents infiltrés… Tout cela ne parvient pourtant pas à convaincre. Les enquêtes s’en remettent à l’intuition plus qu’à la rigueur, les abus policiers se commettent si ouvertement qu’ils en deviennent anachroniques, la technologie moderne balbutie au lieu de faciliter les communications. On ne reprochera certes pas à St-Onge d’avoir fait les recherches souhaitables et de situer avec précision le CODOFIL et la parution de l’Évangélinede Longfellow, mais peut-être aurait-on pu livrer ces renseignements avec une moindre lourdeur didactique.
Heureusement, la Louisiane est là. Avec ses merveilleux emprunts au français et ses savoureux raccourcis. St-Onge n’abuse pas de l’exotisme, il en tire habilement une atmosphère sympathique, chaleureuse, bon enfant. Certes, on est loin de la fluidité linguistique des romans signés Lili Maxime où triomphe l’empathie entre l’auteure et le parler populaire, mais quelque chose de la culture cajun passe quand même. Si l’on poursuivait la comparaison un peu injuste avec les textes de Lili Maxime, on devrait regretter l’absence d’une véritable analyse des rapports culturels et linguistiques entre la Louisiane cajun et ceux qu’on appelle « les Américains ». Le racisme de type Ku Klux Klan n’est pas mort, mais un autre est né qui incite les mères cajuns à enseigner l’anglais à leurs enfants de peur qu’ils soient ostracisés à l’école. Soyons de bon compte : Daniel St-Onge a promis et livré un roman policier de calibre moyen, nul ne lui demandait un traité de sociologie.