On se rappellera que le « poète-dandy » a exploré le « non-dit », tant sur le plan existentiel que sur celui de la vie urbaine nocturne : tout, en fait, ce que cache le jour… dans notre « condition moderne ». On peut parler, à cet égard, d’une poésie urbaine éclatée et assez raffinée à la manière d’un Oscar Wilde. On se reportera au très beau recueil Taxi pour Babylone (Écrits des Forges/Orange bleue, 1996). Dans l’ensemble, l’œuvre poétique de Jean-Paul Daoust peut être vue comme un instrument tant artistique que social visant l’évolution – probable… – de la condition, souvent sordide, de l’ être humain.
Dans le cas de Cinéma gris, nous sommes sensiblement en présence de la même démarche. L’existence souterraine du poète est explorée : « [L]’alcool de la nuit écrit / la vie exacte ». Celle-ci est décrite à l’image d’un film projetant une lumière, à la fois grisâtre et colorée, sur les ruines urbaines engouffrées… Cependant, la vie n’est pas nécessairement montrée comme quelque chose d’uniquement dégradant, car le poète est constamment enveloppé dans le raffinement du « dandy »… tout en entrevoyant les abîmes vers lesquels nous pouvons être amenés à chuter : « [R]umeurs d’incestes de génocides / ne restent que les étoiles de l’ enfer ».