Deuxième biographie consacrée à Claude Léveillée, après Claude Léveillée aux trapèzes des étoiles : chansons et poèmes de Daniel Guérard (L’Homme, 1990), ce premier tome sous la plume de Marie-Josée Michaud couvre la période allant de 1932 à 1960, de la naissance de l’artiste jusqu’à son retour de France, après plusieurs mois de formation et de collaboration avec Édith Piaf. Compositeur visionnaire (« La légende du cheval blanc », « L’Étoile d’Amérique »), Claude Léveillée a su dès le début et avant tous les autres donner une dimension internationale, voire universelle, à des chansons qui parlaient spécifiquement du Québec, évitant le folklore de Félix Leclerc et de Gilles Vigneault, et la légèreté insouciante de Raymond Lévesque.
La première moitié de l’ouvrage relate des moments de l’enfance, le pensionnat et les années au Collège André-Grasset à Montréal, puis les rencontres déterminantes de sa jeunesse (il se lie d’amitié avec les acteurs Edgar Fruitier et Paul Buissonneau) et sa découverte de la musique: d’abord l’accordéon, le banjo et enfin le piano. C’est alors que naîtront ses premières compositions : des chansons comme « Montréal », « La légende des guitares », datant de 1954, dont on trouve intégralement les textes.
Malgré la signature de la biographe, c’est souvent Claude Léveillée qui parle à la première personne, lorsque par exemple il répond aux critiques de féministes lui reprochant ce passage nostalgique de sa chanson « Frédéric » : « Pendant que Maman nous servait ».
La dernière partie de l’ouvrage, qui porte sur « les années Piaf », demeure la plus intéressante. Pendant un an, Claude Léveillée fut le compositeur attitré d’Édith Piaf, alors au sommet de sa gloire. On apprend ici ce qu’étaient les rapports entre Piaf et Léveillée, leur première rencontre à Montréal, les sautes d’humeur de la chanteuse et surtout l’influence qu’elle pouvait avoir sur lui.
On a aujourd’hui du mal à mesurer l’ampleur du talent et de la notoriété de Claude Léveillée durant les années 1960 : pionnier presque légendaire de la chanson québécoise (et française), dont les mélodies restent souvent proches de la musique classique (je pense à « La Campanela », de Franz Liszt), et traduisent une certaine modernité québécoise. Nous attendrons avec impatience le second tome.