La planète porno exerce une force d’attraction phénoménale. Les statistiques défient tout simplement l’entendement. Sur Internet, ce sont entre 5 et 10 % des activités qui se rattachent à la pornographie. À lui seul, le site Pornhub a d’ailleurs accueilli près de 28,5 milliards de visiteurs en 2017. Durant la dernière décennie, enfin, les internautes ont visionné l’équivalent de 1,2 million d’années de vidéos XXX. N’ajustez pas votre appareil. 1,2 million d’années. De quoi veiller tard, très tard.Jean-Marc Beausoleil a flairé la bonne affaire. Inspiré par l’approche gonzo de Hunter S. Thompson, il a passé six mois dans le milieu de la pornographie québécoise afin de percer son aura de mystère sulfureux et de livrer, de manière flamboyante, le compte rendu de ses observations. Version québécoise du Porn Valley. Une saison dans l’industrie la plus décriée de Californie de Laureen Ortiz, Pornodyssée repose sur un même mode opératoire, le storytelling, alignant comme résultat une série de portraits esquissés avec « le trait acéré du caricaturiste ». L’ancien journaliste couvre ainsi les divers maillons de la chaîne de production du cinéma pour adultes : réalisateurs, monteurs, performeuses, producteurs… Les artisans du X d’ici sont étonnamment nombreux à vouloir conquérir Montréal, cœur battant de la planète porno qui n’a, paraît-il, rien à envier à la Porn Valley californienne.Cependant, le cadrage sensationnaliste – « forain », écrit Beausoleil – du « sexe circus » évacue complètement l’analyse critique d’idées présentées comme des préjugés. C’est le cas de ce poncif voulant que seules les victimes d’agressions sexuelles s’adonnent à la pornographie. Le désaccord de l’auteur avec ce point de vue, lorsqu’il l’aborde, est palpable. Il conclut néanmoins en confessant avoir déjà été agressé et, par conséquent, avoir échappé de peu au destin de certains performeurs interrogés. Quand il déclare, litote peu flatteuse et terriblement réductrice, que les gens du porno « ne donnent pas trop dans le métadiscours », il oublie également le contre-exemple d’Ava, une ex-camgirl, titulaire d’une maîtrise en santé publique et en gender studies, doctorante en porn studies, à qui il accorde son attention en fin d’ouvrage. Et Dieu sait combien d’Ava ou d’Ovidie il aurait encore pu dénicher s’il avait creusé ses références plus loin que le marquis de Sade.
PORNODYSSÉE
UNE SAISON DANS L’INDUSTRIE PORNOGRAPHIQUE QUÉBÉCOISE
- Somme toute,
- 2020,
- Montréal
172 pages
21,95 $
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