Dans ses Exercices d'admiration (1986), Cioran écrit sur Borges : « La malchance d'être reconnu s'est abattue sur lui. Il méritait mieux. Il méritait de demeurer dans l'ombre, dans l'imperceptible, de rester aussi insaisissable et aussi impopulaire que la nuance. Là, il était chez lui ».
Borges, qui ne croyait pas – ou affectait de ne pas croire – son œuvre digne d'être lue, aurait pu souscrire à cet avis. Or, si l'on poursuit le raisonnement de Cioran, on constate que l'infortune de Borges est totale : un quart de siècle après sa mort, l'auteur de Fictions1 s'impose, tout comme Proust, Joyce et Kafka, parmi les écrivains ayant le plus profondément modifié notre rapport à la littérature. « Après l'avoir approché, écrit Claude Mauriac, nous ne sommes plus les mêmes. »
Borges a connu un destin privilégi . . .
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