Portée par un tel titre, cette biographie ne saurait prétendre à la neutralité, ni même à la mesure. Elle bat le tambour : « Winston est grand, unique, irremplaçable, et Johnson le démontrera ». L’auteur admettra de mauvais gré que Winston ne fut pas infaillible, mais il enveloppera ses gaffes, indéniables et assez nombreuses, de lénifiantes circonstances atténuantes. Lecture agréable et discutable.
Flamboyant maire de Londres, Boris Johnson admire en Churchill toutes les qualités que l’histoire lui reconnaît et quelques autres en sus. Au dire de Johnson, Churchill incarna la résistance britannique face à Hitler, mais il fut aussi le plaideur accroché aux basques du myope Roosevelt et déterminé à tirer les États-Unis de leur isolationnisme, l’endosseur de l’impérial et dérangeant de Gaulle, le prophète capable de prévoir l’emprise de Moscou sur l’Europe de l’Est, etc. Beaucoup de vrai dans ce bilan, mais Churchill n’eut pas gain de cause dans chacune de ses croisades, même si Johnson fait mine de ne pas le savoir. Les États-Unis furent lents à se mettre en marche, soucieux d’abord de leurs intérêts, prompts à monopoliser les leviers de commande. Détenteurs de la force de frappe requise pour abattre le Reich, ils traitèrent les autres Alliés en subalternes, y compris Londres… et Churchill.
S’exprimant toujours avec au moins une pointe de démagogie, Johnson multiplie les anecdotes dont Churchill serait le héros. Il les aime croustillantes, fréquemment apocryphes, souvent d’un goût douteux. Il conviendra, en fin de parcours, que Churchill a commis des erreurs, mais il le fera en usant d’une grille d’évaluation assez peu subtile qui réduit la responsabilité de Churchill dans les erreurs et décuple ses mérites dans les trouvailles. Ainsi, tout en admettant que l’ego de Churchill dépassait l’entendement, il ne semble pas agacé par la manie persistante du personnage à se mêler de tout, depuis la stratégie spécifiquement militaire jusqu’à la mise au point d’armes nouvelles. Avec des résultats désastreux dont, par exemple, les Dardanelles gardent la mémoire. Johnson laisse même entendre que Churchill, honnête peintre du dimanche, a pleinement mérité le million versé par un admirateur pour tel de ses tableaux. Que la Joconde se le tienne pour dit.
Si l’objectif de Johnson était de magnifier Churchill, la visée est atteinte. L’histoire, elle, aurait droit à des nuances.
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