Une brève histoire du Canada est la traduction française de A Little History of Canada publiée l’année précédente par Henry Vivian Nelles, titulaire de la chaire d’histoire canadienne à l’Université McMaster. Considérant l’histoire canadienne comme une « série de transitions », l’historien place le concept de « transformation » au centre de son ouvrage : « […] le thème récurrent de l’histoire du pays, dit-il en effet, c’est la transformation […] ; l’histoire du Canada est d’abord et avant tout le récit de transformations sans fin ». Et l’auteur de proposer pour sa démonstration une chronologie quadripartite « repens[ée] à fond ».
Le premier des quatre chapitres couvre « la période qui va de l’ère glaciaire jusqu’à 1740 environ, soit [à] l’apogée du Régime français ». Le siècle qui suit (« jusqu’aux années 1840 ») coïncide « avec l’émergence d’une Amérique du Nord britannique distincte en tant qu’entité politique durable située au nord des États-Unis ». Puis, de 1840 à 1939, « on passe d’un assemblage hétéroclite de sociétés coloniales britanniques à un dominion transcontinental quasi autonome ». Enfin, de 1940 à l’an 2000, Nelles « relate la transformation d’une société essentiellement composée de Blancs et fortement marquée par son patrimoine britannique en une société bilingue [sic], organisée et ouverte ».
Au total, la « suite ininterrompue de transformations » (4ede couverture) présentée par l’historien est crédible, voire convaincante. Tout au long de son parcours, Nelles s’attache moins à recenser chacun des nombreux épisodes, militaires, religieux ou autres, qui ont marqué l’histoire du pays qu’à mettre en relief les aspects politiques et économiques qui les sous-tendent. Il conserve de même un regard pour ainsi dire panoramique sur le Canada en ne négligeant aucune partie géographique de l’espace continental.
L’historien objectif cède par ailleurs volontiers la plume à l’essayiste subjectif dans ce qu’il appelle lui-même une « interprétation personnelle » des transformations convoquées. Son ouvrage n’est pas un manuel, précise-t-il, il ne vise pas l’exhaustivité et il tente même de « réduire le nombre de noms au minimum » : on cherche ainsi en vain, par exemple, le nom de Maurice Duplessis ; certains jugements trahissent de même parfois des partis pris tranchés.
Quelques erreurs et anomalies déparent un peu l’ensemble : telle cette voyante coquille lors de l’évocation de la coutume du « mariage à la gamine » (pour « gaumine »), les traducteurs ajoutant par surcroît que l’expression est « en français dans le texte » !
L’essai de Henry Vivian Nelles demeure néanmoins un livre des plus convenables.