Jean-Claude St-Onge est professeur de philosophie à la retraite et docteur en socio-économie. Il a déjà publié quelques essais, dont L’envers de la pilule, pour lequel l’Association des groupes d’intervention en défense des droits en santé mentale du Québec lui a attribué le prix Orange.
Dans Tous fous ? il s’insurge à nouveau contre les dérives de l’industrie pharmaceutique, en particulier en ce qui concerne la médication à outrance de la psychiatrie et de la détresse psychologique. Selon les défenseurs de la biopsychiatrie, les problèmes psychiatriques découlent d’un déséquilibre chimique dans le cerveau. D’où la nécessité invoquée d’utiliser diverses substances afin de corriger ce déséquilibre. Les entreprises multinationales qui fabriquent et mettent en marché ces substances, sous forme de pilules, engrangent des bénéfices gigantesques. Alors, n’est-il pas risqué qu’on en vienne à faire passer les intérêts de ces corporations aux pouvoirs démesurés avant celui des patients ? C’est, essentiellement, la question que pose l’auteur. Et sa réponse n’est pas très flatteuse envers l’industrie. Il dénonce des pratiques qui laissent croire que les intérêts des malades ne sont pas toujours privilégiés. Il affirme notamment que la médecine, sous la pression des sociétés pharmaceutiques, confond trop facilement les réactions normales au stress avec la maladie mentale. Ainsi, une personne qui vit un deuil, un divorce, un changement de carrière n’a pas nécessairement besoin de médicaments, antidépresseurs ou anxiolytiques, pour l’aider à traverser cette période difficile, mais normale.
L’auteur critique également le processus d’approbation des médicaments par les agences sanitaires, qui « souffre de lacunes majeures ». À cela, il faut ajouter le fait que ce sont les compagnies pharmaceutiques elles-mêmes qui sont responsables de mener les tests d’efficacité de leurs produits et qui choisissent quels seront les résultats publiés, ou ignorés. Quand on sait les sommes en jeu, comment ne pas s’interroger ?
En somme, J.-Claude St-Onge remet en question avec beaucoup de perspicacité la médicamentation de plus en plus grande de la détresse psychologique. Il souligne les coûts humains et économiques (en ce qui concerne les finances publiques, par exemple) que ces pratiques peuvent engendrer.