Ce prolifique auteur d’origine malgache vivant en France aborde d’une écriture lyrique le parcours singulier de sa terre natale et de son continent, l’Afrique.
Un continent avec une histoire parsemée de lourdeurs et de traumatismes, dont l’esclavage, qui est « la grande déchirure du continent noir ».
Même si ce pamphlet ne fait que 92 pages, ce n’est pourtant pas une lecture rapide. Raharimanana se lit lentement, morceau par morceau : chaque phrase est poésie, fortement porteuse de sens, et on ne s’immerge dans son livre qu’en étant bien ancré dans cet univers à part.
Tisser, c’est beaucoup une tentative de remise en selle d’un monde oublié, d’un passé « rayé de la mémoire », un retour aux origines en dehors des exigences de l’immédiat qui occupe maintenant toute la place dans nos vies.
C’est un regard soutenu sur les racines multiples du continent, sur ce métissage de plusieurs cultures devant se réapproprier leurs mythes hors de l’influence coloniale.
« Comment peux-tu accepter que tes mots d’ancêtres autrefois si respectés soient aussi déconsidérés, relégués en folklore, seulement appréciés des initiés et constamment malmenés par ceux qui veulent définir tes identités ? »
Le livre appelle au combat à mener contre cette autodestruction, contre la dévalorisation de soi imposée par la servitude coloniale qui a souillé les traditions séculaires, associées par les oppresseurs à l’archaïsme.
Pour se défaire de cette servitude, il faut d’abord « regarder la plaie », puis se réinventer, en se réappropriant son histoire. Une métamorphose graduelle qui permettra de se « décoloniser » et ainsi de retrouver le chemin vers la liberté.