Les aventures de Tintin au Québec ont été multiples et fréquentes. Or, si le lectorat québécois a toujours vénéré l’univers d’Hergé, celui-ci le lui rendait bien. Durant les années 1960, les collaborations entre le créateur de Tintin et le Québec se sont multipliées, et ce pan de notre histoire commune a été quelque peu oublié, même par les biographes européens du maître de la bande dessinée. Avec brio, Tristan Demers comble ces lacunes et fait revivre une dimension de la « Tintinmania » ayant eu lieu exclusivement au Québec ; ainsi, on revoit l’unique visite d’Hergé en sol québécois en 1965 avec des séances de signature à la Compagnie Paquet, à Québec, et son voyage au barrage de Manicouagan, ou encore l’inoubliable concours télévisé Tous pour un de 1967, lorsque le jeune Denis Thérien, âgé de douze ans, se souvint de la moindre réplique et du détail le plus anodin de chaque album de Tintin sur lequel il était questionné.
Au début des années 1960, Tintin était très présent dans les médias québécois, et pas seulement lors d’entrevues exclusives comme celle accordée par Hergé à Judith Jasmin ; la radio de Radio-Canada produisait hebdomadairement des adaptations originales des aventures du jeune reporter avec les voix de l’équipe de La boîte à surprises, dont les comédiens Jean Besré, Jean-Louis Millette et Paul Buissonneau. Des aventures comme L’oreille cassée étaient reprises dans le journal montréalais La Patrie en 1963, à raison d’une page par semaine. Beaucoup de projets, de rumeurs et d’espoirs naquirent alors : peut-être une prochaine aventure de Tintin située à la Manicouagan, ou encore un film de Tintin coproduit à Montréal par l’Office national du film ? Presque tout le monde alors espérait une histoire de Tintin au Québec, avec « l’accent québécois », pour les célébrations du centenaire de la Confédération, en 1967. Malheureusement, Georges Rémi (1907-1983) reste sollicité de toutes parts et ne reviendra jamais en sol québécois.
L’ouvrage Tintin et le Québec est magnifique et comble un vide immense ; son iconographie étonne par l’abondance et la diversité des images inédites montrées pour la première fois, comme ce dessin original de Tintin avec, en arrière-fond, le barrage Manic-5. La mise en page est très soignée. Plusieurs lettres inédites rédigées par Hergé y sont reproduites en fac-similé. Par ailleurs, toutes les allusions au Canada parues dans le Journal Tintin sont identifiées et reproduites.