Après Passeport pour l’Iran, publié en 2006, et Une Québécoise au pays des purs, Récit d’un voyage au Pakistan, publié en 2007, Marie-Eve Martel nous entraîne une nouvelle fois dans un coin méconnu de la planète. Pour cette jeune auteure qui voyage en solitaire, il s’agit, en cet été 2007, d’aller voir par elle-même si la Syrie correspond ou non aux idées reçues entretenues par l’Occident. À cette fin, elle choisit un itinéraire qui illustre bien les « différentes facettes de ce pays » : de la côte méditerranéenne reconnue pour son ambiance libérale jusqu’aux régions plus traditionnalistes de l’Est syrien, de la plus grande métropole du pays, Damas, jusqu’aux plaines désertiques avoisinant certains sites archéologiques, en passant par plusieurs cités antiques comme Alep, Bosra, Palmyre, etc. Mais surtout la voyageuse entend « obtenir une pluralité d’opinions » en sondant « le plus grand nombre possible de Syriens à propos de ‘leur réalité’ ». Elle profite en effet de ses multiples rencontres, notamment avec des commerçants, de jeunes étudiants et étudiantes, un professeur d’université, etc., pour recueillir des témoignages variés, parfois contradictoires. La situation de la Syrie apparaît alors beaucoup plus nuancée que ce que l’on pourrait croire a priori. Certes, les Syriens vivent sous une dictature et « n’ont pas la liberté d’expression dont jouissent les Occidentaux ». Mais le sectarisme religieux ne compromet pas leur sécurité comme dans d’autres pays du Moyen-Orient. De plus, depuis quelques années le pays se modernise non seulement sur le plan commercial mais aussi technologique. Les antennes paraboliques et les téléphones cellulaires envahissent certaines villes. Bien qu’il musèle la presse, le Parti Baas du président Bachar el-Assad semble favoriser pour sa population un plus grand accès à Internet. Enfin, mondialisation oblige, le pays subit de plus en plus les influences extérieures. Ainsi, « même si la plupart des Syriennes portent le hidjab, plusieurs choisissent de s’habiller à l’occidentale ». Sur les étalages des commerces, les produits orientaux côtoient les produits culturels occidentaux, comme les DVD de films américains, etc. Et « en Syrie, impossible d’échapper à notre Céline [Dion] nationale, peu importe où l’on se trouve », constate la voyageuse. Mais par-dessus tout, les Syriens se révèlent être des hôtes accueillants, affables et généreux, qui ne correspondent pas du tout aux images simplificatrices et alarmistes qui « associent trop souvent islam et terrorisme, Arabes et violence ». L’expérience amène l’auteure à faire un constat semblable à celui qu’on trouve dans ses récits précédents au sujet de l’Iran et du Pakistan. À ses yeux, « il importe de dissocier le gouvernement syrien du peuple, de faire la distinction entre, d’une part, la rhétorique réactionnaire du régime et la répression menée par ses services de sécurité et, d’autre part, l’hospitalité et l’amabilité sincères des individus ». À quand le prochain voyage, serait-on tenté de demander à Marie-Eve Martel ? Ce ne sont pas les régions du monde au sujet desquelles subsistent des préjugés qui manquent.
ESPACE PUBLICITAIRE
DERNIERS NUMÉROS
DERNIERS COMMENTAIRES DE LECTURE
Loading...