« Longtemps j’ai cru que ma maison était un rempart contre les malheurs qui viendraient de l’extérieur. J’aimais m’y réfugier. / À l’âge qui est le mien, je sais qu’il n’y a plus de refuge. Je me sens assailli de toutes parts. »
Dans son nouvel ouvrage, Gilles Archambault poursuit le monologue auquel il a habitué ses fidèles lecteurs, sur un ton empreint de nostalgie et de mélancolie. Il nous permet de l’accompagner dans ses promenades sur la « rue McGill, du square Victoria à la rue de la Commune, [qui] constitue désormais [son] territoire ». Plus que la rue, c’est sa vie qu’il arpente ainsi sans relâche, regrettant, comme il l’a déjà dit, d’avoir été parfois si distrait. Il « pense de plus en plus aux années de [son] enfance, aux figures qui l’ont peuplée ». Même si se « promener seul n’a jamais été pour [lui] une punition », il affirme : « Ce goût m’est passé. La plupart des promenades que j’ai tentées depuis que le deuil a foncé sur moi ont été ratées ». Il s’avoue piètre observateur, ajoutant que l’architecture lui sera toujours un mystère.
Au cours de ses marches, il lui « arrive de [se] tourner vers la gauche comme si quelqu’un [l]’accompagnait ». Il précise : « Pendant longtemps, il y eut une femme dont tout naturellement j’avais la présence ». On comprend que c’est cette présence, devenue absence, qu’il cherche surtout à retrouver, en déambulant sur McGill. Il affirme d’ailleurs être incapable de « faire son deuil » : « Il me semble que ma femme m’attend. […] Je me comporte souvent en tout cas comme si je pouvais la retrouver au détour d’une rue ». Il pense également au repos ultime, de moins en moins éloigné. Cette fin qu’on affronte seul ? « Tu n’en sais rien, disait l’en-allée, qui sentait la mort si proche. »
Les belles photographies en noir et blanc d’Erika Nimis sont parfaitement assorties à l’ambiance et agrémentent le bel objet qu’est ce livre. Bravo aux éditions du Noroît pour avoir si bien su marier le talent de l’auteur et celui de la photographe !