Selon qu’on la traite comme une mode ou une constante, la littérature érotique couronne périodiquement de nouvelles voix ou réédite ses classiques. Elle survit sans toujours se renouveler, et cela, même si elle bénéficie de tolérances inédites. Lèverait-on le voile sur certains pseudonymes que s’évanouirait le mythe voulant qu’il s’agisse d’une littérature produite par des minables pour des hypocrites. Que cette littérature soit répandue, qu’elle accueille des plumes raffinées, qu’elle se faufile discrètement dans les bibliothèques parentales les plus empesées, voilà qui ne justifie pourtant pas qu’elle verse dans la facilité. Comme l’écrivait un excellent critique, « ce n’est pas parce que le sexe n’est plus péché qu’il doit être laid ». Le Salon de Marie Lafortune ne respecte pas ce critère pourtant assez poreux.
« Pour la première fois, affirme sans rire le texte de quatrième de couverture, les non-initiés pourront découvrir ce qui se passe vraiment derrière ces façades bien souvent anonymes où de jeunes femmes de différents milieux offrent des services de toutes sortes à des hommes en mal de détente, d’excitation ou d’amour. » On aura compris que tous les clichés du genre répondront « présent ». Pour en dire aussi peu et s’en tenir à de telles banalités, il n’était vraiment pas nécessaire (si on l’a fait !) de confesser des professionnelles du salon. Ni la sexologie, ni l’anthropologie, ni d’ailleurs l’écriture ne sont vraiment mises à contribution.