Noire de religion musulmane née dans la pure pauvreté à Djibouti, en Afrique de l’Est, Safia Otokoré, la jeune trentaine, est maintenant maire adjointe d’Auxerre et cadre du Parti socialiste français, à titre de responsable des sports.
Comment une femme, au départ aussi matériellement démunie, en est arrivée à côtoyer l’élite d’une des grandes puissances du monde, constitue l’essentiel de ce récit simple, de lecture facile.
Le sous-titre du livre peut apparaître quelque peu trompeur, et l’auteure serait la première à l’admettre. « J’ai l’honnêteté de reconnaître que si j’étais arrivée femme de ménage, sans argent, sans contact, sans amis, jamais je ne serais parvenue à construire ce qu’est ma vie aujourd’hui. Ce sont là les limites de mon histoire. »
La politicienne française est effectivement débarquée en France comme amie et future épouse d’un grand et argenté footballeur français d’origine africaine, et ainsi projetée dès son arrivée dans une vie de grande bourgeoisie. En ce sens, son histoire n’est pas un conte de fées.
Cela dit, Safia Otokoré a dû trimer dur. Grâce à l’ouverture d’esprit relatif de son père, à l’opiniâtreté de sa mère et, surtout, à sa propre détermination, elle part étudier à Abidjan, alors la cité des lumières de l’Afrique francophone. Toutefois, excisée et infibulée (cousue) dès son jeune âge, la future championne sportive de son pays vit cette marque comme un viol de son corps et de sa dignité. Paradoxalement, c’est cette plaie vive qui lui donne la volonté de se sortir de son milieu, encore étouffé par des traditions ancestrales, particulièrement néfastes aux femmes. D’où son dégoût total pour ces pratiques, mais aussi son combat en faveur des opprimés, notamment les immigrants de France, et son enthousiasme contagieux pour l’Europe, qu’elle considère comme la voie à imiter pour son continent d’origine. « […] je vois l’Europe comme un soleil. Je la trouve magnifique. Elle est l’avenir, la modernité, l’espérance en un monde meilleur. Elle est une référence. L’Afrique manque de ces visionnaires qui ont bâti l’Europe sur les cendres encore fumantes d’un monde ravagé par la Seconde Guerre mondiale. »