J’avais bien aimé la moiteur décadente de Tonkinoise, qui nous servait une tranche de vie indochinoise, à l’époque où la présence de la France s’étiolait jusqu’à l’issue fatale de la guerre. Cette tranche de vie était aussi en quelque sorte une tranche d’histoire, qui échappait à la complaisance.
Avec Rue du Japon, Paris, Morgan Sportès fait cette fois dans l’estampe japonaise, façon sex shop « intello » parisien. L’auteur cherche à répondre, nous dit son éditeur, à la question : « Peut-on fixer l’empreinte d’un amour ? » Soit. Est-ce parce que les japonaiseries sont actuellement un must des modes littéraires ou autres ? Est-ce parce que Morgan Sportès était battu d’avance sur ce terrain par les grands maîtres japonais de l’érotisme ? Son livre, trop bavard à mon goût, m’a agacée.
On aura compris que l’essentiel du roman tourne autour de la rencontre fortuite d’un écrivain parisien et d’une jeune beauté japonaise en poste à Paris. Cette dernière s’exprime dans un français parfait, avec juste la petite touche d’erreurs sémantiques qu’il faut pour être exotique. Bien sûr, la demoiselle est intelligente et cultivée, sans quoi le jeu n’en vaudrait pas la chandelle. Elle a aussi l’imagination qu’il faut pour provoquer et exciter son écrivain. Celui-ci a au moins la bonne grâce de se voir tel qu’il est, un écrivain vieillissant, s’interrogeant sur son pouvoir de séduction, mais pas trop quand même.
Ce commentaire ne rend peut-être pas justice au roman. Il est possible que les amateurs d’intellectualisme narcissique et érotique y trouvent malgré tout leur compte.