À l’automne 1996, l’Université d’Ottawa organisait un colloque pour souligner le 100e anniversaire de naissance de l’auteur de l’incontournable Menaud, maître-draveur. Dans Relecture de l’œuvre de Félix-Antoine Savard, Roger Le Moine résume les différentes activités qui ponctuèrent ce colloque (hommages et témoignages d’amis et d’ex-étudiants, lecture de textes, lancement de livre, audition d’un opéra, chants, exposition d’archives…) et présente les communications qui y furent entendues.
Reproduites ici pour la plupart, ces dernières abordent l’une ou l’autre des œuvres savardiennes à partir de grilles diverses : historique avec Roger Le Moine (les origines de Menaud et de L’abatis), intertextuelle avec Jean des Gagniers (la filiation virgilienne), linguistique avec Jules Tessier (l’autocensure lexicale et phrastique) et herméneutique (de type « psy » avec Jacqueline Gourdeau et Mona Gauthier, et de type socio-sémantique avec Donald Smith – qui pourfend de belle façon le polémiste William Johnson). Autour de Cécile Cloutier, Yvon Mallette, Réjean Robidoux et Pierre Perrault, une table ronde permet de conclure à la pérennité de l’œuvre de Félix-Antoine Savard.
De tous ces textes intéressants, je retiens la double intervention du cinéaste-poète Pierre Perrault. Dans un magnifique hommage, bien senti et fortement documenté, rédigé de surcroît sous la forme d’un poème en vers libres, Pierre Perrault « revendique » d’abord sa position de « rebelle » face à l’homme à qui il reproche d’avoir « renié » Menaud, tout en gardant « le plus grand respect pour le poète » qui a inventé ce héraut. Puis, en table ronde, Perrault revient sur le sujet en défendant la « liberté » que Savard avait proposée dans son célèbre roman et « qui l’a effarouché au dernier moment », c’est-à-dire lors du célèbre «Testament politique » de 1978. Peu importe les opinions constitutionnelles de chacun, nul ne demeurera insensible à ce langage inventif et « poétique » (au sens étymologique du terme), qui associe superbement la voix du cœur à celle de la raison.