En mai 1829, un équipage de pêcheurs madelinots accoste à la pointe est de l’île d’Anticosti. Dans un dépôt de provisions pour les naufragés, un sinistre spectacle les attend : des dépouilles ayant été l’objet de cannibalisme.
Récits de naufrages regroupe l’intégralité des textes contenus dans un cahier portant le même titre et rédigés vers la fin du XIXe siècle par Placide Vigneau. Le fonds d’archives – constitué de notes, de manuscrits et de correspondances – de ce pêcheur, capitaine de goélette et gardien de phare, devenu un chroniqueur prolifique, est conservé à BAnQ Sept-Îles. L’ouvrage est présenté et annoté par Amélie Blanchette, Guillaume Marsan, Billy Rioux et Jean-René Thuot, de l’Équipe de recherche Manuscrits de l’Université du Québec à Rimouski.
« Le massacre de l’Anticosti », comme l’appelle Vigneau, est le sujet principal de cette entreprise d’édition scientifique. Il s’agit de la description d’un macabre épisode d’anthropophagie découvert sur l’île d’Anticosti, en 1829, par des pêcheurs des Îles-de-la-Madeleine y ayant fortuitement jeté l’ancre. Le récit de cette triste histoire a été recueilli par l’auteur en 1894 auprès du nonagénaire « père » Basile Giasson, un des pêcheurs ayant trouvé les corps mutilés des naufragés du Granicus, 65 ans plus tôt. Une seule des dépouilles gisant dans le bâtiment devant servir de dépôt de provisions – mais laissé à l’abandon pour une quelconque raison – était intacte. Un long couteau à loup-marin placé près de l’homme semblait le désigner comme l’ultime responsable de l’horrible boucherie. Mais diverses autres interprétations ont par la suite été envisagées. Il est certain que l’abandon du dépôt, quelque temps auparavant, a contribué à l’infortune des naufragés.
Placide Vigneau rapporte quelques autres naufrages, en mettant souvent l’accent sur les bénéfices que les pêcheurs nord-côtiers pouvaient en tirer. Il semble que la récupération des cargaisons des malheureux navires représentait à l’époque une activité lucrative.
Divers autres textes relatifs à la vie des communautés de marins de la Côte-Nord ou à l’auteur et à son entourage complètent Récits de naufrages, un important document de référence à propos de la région et de l’estuaire du Saint-Laurent.