« La chair est triste hélas » et j’ai lu tout ce livre ! (par curiosité sans doute pour l’immanquable phénomène Angot). C’est à mon sens infiniment regrettable mais la mode contemporaine en littérature est à l’infatuation et au ressentiment. Le narcissime est de rigueur, qui ne prétend nullement à la rectitude. La vogue des diaristes de tout poil affectés de nombrilisme contagieux submerge le paysage éditorial, devenu ‘ pour citer le bon mot de Jérôme Garcin ‘ la vitrine du « tout-à-l’ego ».
Quitter la ville est donc la compilation des derniers états d’âme, des phantasmes, des rancœurs d’une Christine Angot désireuse de retrouver Paris, où grenouille le petit monde grouillant de l’édition qu’elle exècre et qu’elle convoite tout à la fois, écartelée qu’elle est (ou qu’elle feint d’être ?) entre aigreur et obsession de devenir célèbre, quête plaintive d’un statut d’écrivain qu’elle revendique non sans asséner avec ironie quelque amère riposte et faire accessoirement la comptabilité de ses gains éditoriaux. Pour la petite histoire, la ville à quitter, ici, est Montpellier, où se situait une grande partie de L’inceste qui lui a valu les pires brocardages et la renommée.
En termes de comédie humaine, personne n’a encore fait mieux ni plus actuel que Balzac ; mais à défaut de vous conseiller la (re)lecture des 90 romans de cette fresque monumentale, alors que Christine Angot écrit « Je suis la meilleure vente de tout le groupe Hachette, devant Picouly et devant Bianciotti », je serais tout simplement tentée de vous suggérer : lisez Bianciotti !