Jeanne est une chirurgienne reconnue, une missionnaire dévouée. Elle s’investit corps et âme dans ce travail qui l’amène à côtoyer ceux qui souffrent, ceux qui appellent à l’aide ou ceux qui désirent tout simplement trouver le repos. La mort, elle la connaît bien et a même réussit à l’apprivoiser. Toutefois, elle ignore encore ce qu’est la vie, la vie qui donne naissance aux sentiments, qui enveloppe et transporte l’être au delà du superficiel du quotidien. Mais voilà qu’elle rencontre Magali, une jeune femme clouée à son fauteuil qui, malgré son immobilité et son mutisme accablant, fait découvrir à Jeanne toute la beauté et la sérénité du monde qui l’entoure. « […] cette femme, qu’elle croyait totalement impuissante, […] l’a défiée du regard et l’a mise à nu[e]. »
Aude est passée maître dans l’art d’explorer l’humain. Elle se faufile discrètement au cœur de ses personnages pour ensuite aller cueillir, sentir, comprendre leur essence. Dans Une chaise au fond de l’œil (1997), l’auteure explore la conscience d’une jeune femme qui, atteinte d’un trouble mental, se construit une forteresse d’où elle peut observer l’immensité du monde tout en se protégeant de ses affronts. Bien que les deux romans abordent des thèmes et des personnages analogues, Quelqu’un ne fait pas vivre l’expérience extrasensorielle d’une lecture de Une chaise au fond de l’œil. L’écriture est beaucoup moins dense et les images semblent manquer de profondeur. De plus, le découpage du roman en quarante petits chapitres distincts freine grandement la lecture. Les personnages sont peu attachants, leur histoire n’est qu’effleurée, jamais réellement dévoilée. On ne retrouve plus la complexité et l’étrangeté envoûtantes des recueils de nouvelles tels Banc de brume (ou Les aventures de la petite fille qu’on croyait partie avec l’eau du bain) (1987) et Cet imperceptible mouvement (1997). Néanmoins, l’écrivaine saura sans doute réinventer ce souffle qui trouble et exalte, ravage et apaise.