Partant des acquis de l’expérience politique de la « gauche historique » en Amérique latine et des impasses qui marquèrent son évolution, Pierre Mouterde tente de cerner dans son sillage la singularité des mouvements sociaux d’origine populaire de la dernière décennie et leurs potentialités pour la redéfinition d’une alternative sociale. Quand l’utopie ne désarme pas propose donc une intéressante réflexion sur la question de la « subjectivité sociale », sur les orientations et les pratiques innovatrices de mouvements qui ont par exemple émergé au Mexique (Zapatistes), en Équateur (Mobilisations Autochtones) et au Brésil (Mouvement des sans terre). Soucieux de mettre à l’avant-plan la problématique de la démocratie politique, l’auteur remporte un pari difficile en combinant adroitement le bilan de ses observations, l’analyse du contexte politique et le travail conceptuel. Ce qui frappe est sans doute le caractère multidimensionnel, radical et anti-systémique de ces mouvements. Cherchant à dépasser l’objet identitaire de leur lutte, leur démarche s’inscrit dans une perspective plus globale sur le plan politique. Cela se traduit par une conscience plus élaborée des obstacles qui les confrontent ainsi que par une tentative de clarifier les voies de l’émancipation qu’ils projettent. Mais là se situe également une difficulté qui leur est commune, soit la construction des médiations politiques nécessaires à la réalisation de leurs objectifs. Encore et toujours, c’est la question du pouvoir qui se pose : comment en disposer au delà de l’action revendicative accolée à la mobilisation pour le projet ? Ainsi, il s’agit de « mieux saisir passages obligés et innovations fécondes » selon la formule bien choisie de l’auteur. L’intérêt heuristique de cette combinaison demeure au centre de cette démarche stimulante, bien ancrée dans l’engagement et où la compréhension trace déjà une partie du chemin à accomplir.
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