À partir du Choix de poésies de Nérée Beauchemin qu’il avait fait paraître en 1950, Clément Marchand livre aujourd’hui 51 pièces du médecin-poète de Yamachiche ‘ curieusement, il en annonce « quarante-neuf ». Une rapide mais judicieuse et sympathique présentation évoque d’abord « Beauchemin l’oublié », avec lequel l’auteur a eu des contacts personnels. Suivent des extraits du premier recueil, Les floraisons matutinales (1897), puis du second, Patrie intime (1928), qui forment « l’œuvre brève mais quintessenciée » de l’artiste. Marchand ajoute aussi quelques « autres poèmes », postérieurs, en général, à la production livresque.
Dans ce florilège, on trouve bien sûr des textes canoniques, comme l’éponyme « Patrie intime », qui a souvent servi aux commentateurs pour décrire l’art poétique de l’auteur, et « La branche d’alisier chantant », poème d’une savante simplicité et d’une exquise musicalité, fort représentatif du meilleur Beauchemin. On y recherche toutefois en vain « La cloche de Louisbourg », jadis réputé et volontiers cité.
Ces poèmes, pour ainsi dire d’un autre âge, chantent la nature, Dieu, les origines françaises, les travaux des champs, bref tout ce qui fait l’essence de la littérature régionaliste de l’époque. Et à l’instar de la plupart de ses contemporains, l’écrivain pratique une poésie strophique versifiée (souvent octosyllabique) où domine le quatrain. Comme le souci de la perfection formelle anime l’auteur autant que le désir de célébrer sa petite patrie, ses vers n’ont pas vieilli. Peut-on en dire autant de l’œuvre poétique des hérauts du terroir de ce temps, comme Blanche Lamontagne-Beauregard et l’ineffable Louis-Joseph Doucet, proclamé « prince des poètes canadiens-français » en février 1924 ?
Soulignons que la nouvelle anthologie de Clément Marchand mentionne à bon droit l’incontournable et richissime édition critique des œuvres de Beauchemin qu’Armand Guilmette a publiée en 1973-1974 et qu’il faudra bien un jour rééditer.