Une balise est plantée. Solide et visible. Cette anthologie intègre une telle masse de réflexions que tout débat sur la santé de l’histoire au Québec devra en tenir compte. Les deux coordonnateurs ont ratissé large, sans jamais verser dans la caricature ou le bon-ententisme. Ils n’ont pas suivi telle mode qui aurait injustement écarté Rumilly ou Groulx ni telle autre qu’on accuse de gommer les aspérités québécoises. Cette hospitalité, belle forme de politesse intellectuelle, révèle un exemplaire souci de la vérité, tout en nous épargnant le style « tout le monde il est beau, tout le monde il est gentil ». Toutes les thèses ont pu se faire valoir ; certaines, comme il se doit, sortent de l’exercice non pas discréditées, mais pressées de s’évaluer plus rigoureusement. La tendance quantitative, par exemple, qui a permis de troquer la manie des dates et des vedettes contre l’observation des tendances sociales et économiques de tout un peuple, se fait dire qu’elle n’est pas dispensée de la recherche du sens. « Il s’agit de découvrir, en somme, comment le Québec, parmi d’autres, a vécu son anormalité, ne serait-ce que pour mieux en sortir. » De quoi réconcilier (peut-être) ceux qui lissent les différences entre le Québec et le monde et ceux qui, au contraire, les mettent en exergue.
La confrérie des historiens a de quoi pavoiser. Non seulement elle mène ses recherches avec entrain, mais encore elle consent à mettre en lumière ses convergences et ses questionnements. Magnifique !