Or, comme les trois romans précédents des Chroniques infernales, nous entraîne dans le monde souterrain des enfers que des passages relient au monde extérieur. L’aventure centrale racontée dans Or est celle de Lame, épouse de Rel, roi des enfers. En l’absence de celui-ci et de ses acolytes, partis pour le monde extérieur, Lame est prise au piège par des fourmis-bourreaux. Ces squatteuses des anciens enfers mous ont vite fait de métamorphoser Lame en larve, sort considéré comme irréversible et le plus atroce des châtiments infligés dans les différents enfers. Son ventre devient énorme et Lame se trouve paralysée, enfoncée dans la cendre et dans la boue. Il lui reste son imagination, dont elle use pour réinterpréter sa vie précédente, à Montréal, vie qu’elle avait fuie jadis en se suicidant. La colère l’assaille d’abord, contre ses ancêtres et contre « le monde terre à terre de Montréal dans lequel [elle] se plongeait par ses souvenirs », cette ville où elle étouffait, comme dans l’enfer mou où elle se retrouve, gavée, mais prisonnière. Mais bientôt sa colère se trouve sans objet, Lame ayant le sentiment que « […] la grosse métropole […] ne valait pas la peine qu’on la déteste. De même pour le clergé, les riches, le gouvernement ou les ancêtres ». Au fur et à mesure que s’estompe son ressentiment, une paix intérieure la gagne… jusqu’à sa libération.
Ainsi l’histoire d’Or est-elle une allégorie d’une transformation intérieure. Le titre, symbole parmi un entrelacs de symboles, suggère le sens du chemin initiatique parcouru par Lame : « […] j’ai trouvé l’or des ordures, l’or de l’horreur et l’or des orgies ». La lecture d’Or terminée on se demande comment interviendra Lame pour aider les damnés des enfers mous à s’en sortir, puisque tout laisse croire que c’est là son intention.