Le premier livre de Julie Bouchard porte un magnifique titre : Nuageux dans l’ensemble. Il est vrai que les neuf courts textes qui composent ce recueil de nouvelles présentent des portraits d’hommes et de femmes, souvent de couples, qui ne se portent pas très bien. Le sujet n’est pas neuf, mais la nouvelliste remporte souvent son pari : créer des atmosphères uniques qui nous entraînent de la familiarité à l’angoisse, quand ce n’est directement vers l’horreur.
Si certains archétypes de drames familiaux font leur chemin dans le recueil, c’est cependant quand elle maintient ses récits dans les demi-teintes que Julie Bouchard frappe le plus juste. La rencontre manquée dans « Nous n’aurons pas besoin d’aide » devient prétexte à des portraits ciselés de trois protagonistes de grand âge. Le détachement de Sylvia dans le premier texte du recueil frappe aussi le lecteur, le laissant sur un sentiment d’inachevé qui n’a rien de regrettable. Très souvent, comme dans la nouvelle « Ma sombre robe de mariée », les images font mouche : « Derrière moi, quatre bouquetières tenaient ma traîne, soulevaient mon voile, m’aidaient à me déplacer dans cette robe imposante comme un surplus de joie ».
Le texte conclusif, « (Ne plus) pleurer pour les garçons », insiste peut-être trop sur l’évidente cohérence du recueil en s’appuyant sur les protagonistes des histoires précédentes : « Je porte maintenant le nom de toutes celles qui ont souffert avant moi, je suis Sylvia, je suis Joyce, je suis Patti, je suis Liliane, je suis Julia ». Ce récit à la deuxième personne, lettre désespérée à celui qui nous abandonne, n’a pas la force d’évocation des huit histoires précédentes malgré sa tentative de réunir des destins de femmes trompées, oubliées ou déçues. La coda convoque un certain lyrisme plus conventionnel qui est habilement évité ailleurs. Mais la force des portraits dressés dans le reste de l’ouvrage nous accompagne plus longtemps que cette déception.
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