On ne peut aborder la question de la « menace terroriste » en dehors des conditions de son émergence. René Passet et Jean Liberman nous invitent ainsi à comprendre ce phénomène en l’insérant au cœur des politiques et transformations marquées par la mondialisation. La « menace terroriste » s’est nourrie, s’est consolidée et s’est élargie à l’aune de cette évolution. Son terreau, selon les auteurs, est constitué de la misère, des inégalités, de l’humiliation et d’une certaine érosion des valeurs. Considérant le déploiement sans précédent de la criminalité économique, l’hyperterrorisme doit être vu comme le produit de la dégénérescence d’un système caractérisé par les liens de dépendance qui se développent entre économie criminelle et légale. À partir du blanchiment d’argent et de l’activité sans frontières des paradis fiscaux, l’opacité du système économique international permet le financement du terrorisme.
C’est un blocage réel des perspectives, une situation de déracinement et d’exclusion qui se combinent pour aboutir au « martyrisme intégriste ». Ce sacrifice de l’individu se voudrait selon les auteurs une sorte de « substitut » aux valeurs largement défendues par l’Occident mais systématiquement bafouées au sein de la logique économique et de la politique qui orientent concrètement son action. Si nouvelle donne il y a après le 11 septembre, elle doit être repérée dans le nouveau «cours impérial » et militariste des États-Unis qui vient saper les objectifs déclarés face au problème terroriste. Les conditions permettant l’expression des moyens de révolte du terrorisme politique ne sont donc pas remises en question et la mondialisation financière débouche sur une véritable mondialisation des conflits.
Malgré une approche intéressante pour aborder les arguments de « l’alibi antiterroriste » américain et leur signification, l’ouvrage manque de consistance quand il s’agit d’entrevoir d’autres solutions tant sur le plan politique où il opère une distinction spécieuse entre deux types de réformisme que sur le plan économique où on ne sait pas trop ce qu’implique en termes de rupture avec la mondialisation « remettre l’humain au cœur de l’économie » .