Le discours d’Elizabeth George est que ne devient pas écrivain qui veut, encore moins auteur. Quant à l’âme d’artiste, ça s’attrape à la naissance ou en cours de route, lorsqu’on est touché par la grâce divine. Reste la cohorte de celles et ceux qui ne se reconnaissent pas dans cette exception. Que ces derniers ne désespèrent pas car il y a une méthode qui s’apprend pour écrire un roman. Ça s’enseigne – ça on le savait – et l’auteure de polar nous en dévoile quelques outils et techniques. On ne parle pas de décrocher un Goncourt, il s’agirait d’un saut en avant dans la maîtrise de l’art et là, là, là, ils et elles sont rares à pénétrer cet espace-temps…
Écrire est un métier ; il ne suffit pas de s’asseoir devant son écran et de taper vingt pages pour se gonfler l’ego et claironner qu’on tient le début d’un commencement d’un livre sauvegardé dans un fichier. Travail, passion, discipline sont les maîtres mots. Reste pour celles et ceux qui sont tombés dans la soupe primitive : le talent. Mais bon, on va arrêter de se battre la coulpe et de se faire mal inutilement.
Elizabeth George a solidement illustré son propos, par ailleurs très honnête, de textes d’une vingtaine d’auteurs Elle ne cache rien de ses états d’âme, de ses hésitations et de ses échecs en cours d’écriture, ce qui nous la rend proche et paradoxalement rend son travail absolument rebutant. Préparation, séquencier, canevas, etc., processus compliqué pour accoucher d’un polar. Elle le dit sans emphase, elle n’a pas à éprouver des joies extatiques pour raconter ses fictions, elle veut juste avoir le sentiment du travail accompli. Aussi, s’est-elle emparée d’une méthode qui fonctionne pour elle. Et le moins qu’on puisse dire, c’est que sa recette lui évite le syndrome de la page blanche et les écueils de la réécriture d’un chef-d’œuvre supposé. Le chapitre 15 est sur ce point éloquent dans le dévoilement des secrets à connaître et des faiblesses à corriger ; c’est le chapitre à lire pour éviter tout amateurisme. Au moins on ne peut reprocher à l’auteure de ne pas tenir son lecteur en haleine jusqu’au point final. Pour l’ahuri devant tant de procédés ou pour le paresseux qui fuit le « cent fois sur le métier… », elle réserve de bonnes révélations biographiques.
Ah oui, quant à la fameuse et très fantaisiste Muse, rien ne semble franchement l’amadouer. En tout cas Elizabeth George, qui s’y connaît en recherche de preuves irréfutables, n’en a pas trouvé. Dans ce livre donc, il n’y a pas de trucs, il y a du travail, beaucoup de travail. Allez hop ! au boulot.