Cet ouvrage a été conçu pour accompagner l’exposition des œuvres de Marian Dale Scott présentée au Musée du Québec du 6 avril au 4 septembre 2000. Si l’historienne de l’art Esther Trépanier, commissaire de l’exposition et auteure du livre, confie en préambule que « Marian est devenue une amie très chère », elle est parvenue à ne jamais verser dans l’hagiographie. Elle a même réussi à examiner très subtilement, et avec objectivité, la frustration que toléra une Marian Scott nantie d’un mari célèbre et brillant qui prenait « une large place que son épouse, de son propre aveu, lui laissait volontiers ».
Femme réservée, donc, mais aussi pionnière : une dualité psychologique dont Esther Trépanier devise admirablement dans un chapitre savoureux, « Une gauchère que l’on a obligée à devenir droitière à l’âge de huit ans ». Innovatrice, Marian Dale Scott le fut assurément, à trois titres au moins : elle fit partie de ces artistes canadiens qui ont les premiers exploré les voies de l’art moderne avant les années 1940 ; elle fut aussi l’une des premières femmes à accéder à l’université et au statut d’artiste professionnelle ; elle fut enfin une exploratrice de l’art qui n’a pas craint de s’aventurer dans des voies nouvelles. « Au total, écrit John R. Porter, directeur général de l’exposition, son univers pictural aura embrassé le paysage, l’univers urbain, la figure humaine, l’univers végétal, l’univers cellulaire et l’abstraction géométrique. » Son art aura beaucoup évolué, de la modernité figurative à l’abstraction ; le livre, réalisé selon un plan chronologique, en fait parfaitement la démonstration. Marian Scott a vécu avec son siècle, ne s’est pas censurée, ne s’est pas empêchée non plus d’être « perméable aussi bien au Groupe des sept qu’à l’art européen et à l’art américain [avec] un intérêt particulier pour les arts primitifs, l’art chrétien, l’automatisme et le courant plasticien », avant de tenter, au terme de son itinéraire pictural, de réaliser une synthèse dialectique de la structure et de l’expressivité. Trente pages de reproductions en couleurs illustrent d’ailleurs le prodigieux itinéraire artistique de Marian Scott, des maisons québécoises des débuts au merveilleux portrait de Loïs Gordon, des fleurs et des escaliers roulants du magasin Eaton aux compositions sans titres de la fin.
Une liste des illustrations et des œuvres de l’exposition de Québec, des repères chronologiques, une bibliographie sélective et un index onomastique complètent cet ouvrage fort bien rédigé, que l’on serait tenté de qualifier d’exhaustif. Une rétrospective remarquable d’une pionnière canadienne de l’art moderne.